1.11.07

Horreur Malheur

L’autre jour je me demandais si un endroit où la justice régnait serait bon à vivre. Je ne pense pas vous savez, et c’est ça qui me mine. Il faudrait alors que l’on cesse d’être parfait, que l’on range le fruit. A quoi bon sinon. On viserait tout le temps juste. On serait de véritables machines. Tous les matchs finiraient par des matchs nuls. Je sais pas. J’ai du mal à saisir. Il paraît qu’il faut du piment dans une pizza. D’autres soutiennent le contraire. Faut-il du piment dans la vie. Faut-il un coquin hasard. Parfois un hasard cruel. Devons nous savoir tout contrôler ?

J’aimerais ne plus avoir peur d’affronter les démons que je dénonce chez les autres. Etre assez courageux pour aller défier mon voisin bruyant, en sympathisant avec lui tout simplement. Etre assez courageux pour appeler mes anciens amis. Etre assez audacieux pour voyager sans craintes et sans attaches. Je me plains de la vie, du fait que les gens sont des peureux. Mais je suis comme eux. Je suis comme ce type, ce prof de gym incapable de faire une galipette. Ce donneur de leçon qui ne les a jamais apprises. Je me sens trop seul pour faire un pas en avant. J’ai besoin qu’on m’accompagne.

En fait tout le monde doit voir l’injustice, même sans y penser. Dans "Les Bienveillantes", il arrêterait bien de tuer les juifs, de faire des horreurs. Il a des accès, des réflexes d’humanité, au sein d’action inhumaines, horribles. Tout le monde joue la carte de l’horreur consciemment, mais en se disant qu’on est pris dans le mouve, incapables de remonter le courant. On fait ce qui doit être fait, mais si on était seul à décider, on agirait autrement. On ne sait plus prendre le pouvoir à son compte. On a trop peur pour son intégrité, on est habitué à avoir peur pour ça. Comme dans l'expérience de Milgram, nous nous refilons des electrochocs entre nous. Car on nous dit de le faire, et que l'on voit ses voisins faire la même chose. Car nos valeurs actuelles respectent aveuglément l'autorité et l'importance d'être dans la conformité. Pourtant, nous souffrons tous émotionellement de faire du mal. Nous souffrons car cela va à l'encontre de nos aspirations les plus profondes.

On est tous pareil. Nous sommes tous des bons-hommes qui agissent en salopards. On voudrait héberger le sdf du coin, on voudrait stopper la faim dans le monde, on voudrait être exemplaire. Mais on ne le fait pas. Car on se sent en minorité. C’est comme si chaque atome de plutonium d’une bombe atomique se sentait seul et impuissant, insignifiant. Qu’est ce qui fait qu’ils vont s’embraser ?

Je voudrais la connaître la justification des bienveillantes. La justification de cette boucherie ambiante et perpétuelle. De tous ces viols psychologiques. Ah c’est sur, si on prend de la distance avec la vie, avec la réalité, tout ça est bien peu. Et l’amour, ça aussi c’est bien peu ?!
Je veux vivre, être heureux, encourager l'amour. Mais parfois un murmure s'impose à mes oreilles :
A QUOI BON.

A Quoi bon souffrir, à quoi bon mourir, à quoi bon être tué, violé, villipendé, insulté, torturé, martyrisé. L’amour ? Etre aimé ? Etre chéri ? Un cadeau tel que l’amour est inestimable certes, mais qu’arrive-t-il lorsqu’on vous dit le prix ? Si j’offre la plus belle des bagues à mon amour, va t-elle l’apprécier encore plus lorsqu’elle saura qu’elle m’a couté tant ?! Elle sera soit déçue, soit déçue. Déception du peu, ou déception du trop. Il n’y a pas de juste valeur à tout ça. Il n’y a pas, il ne doit pas y avoir de contrepartie au bonheur. Pas autant. Je ne peux pas être heureux de me fourvoyer. Je ne peux pas être heureux de risquer la peine. Le risque ça peut être sympa, mais tout est relatif. Le viol ? La torture ? Et si vous me dites que ce n’est pas si terrible, que cela n’est que la vie, que tout ceci n’est qu’imperceptible en face de l’immensité de l’éternel, de l’infini, de la magnifique grandeur de dieu, alors merde, comment voulez vous qu’on prenne au serieux la vie.
Je t’aime mais, si tu te fais tuer, je serais pas triste, puisqu’on est tout petit, et qu’il y a plus important.

Tout est relatif dites vous ?! Alors je mène ma vie de manière relative. Je ne peux pas prendre mon pied. Je ne pourrai le prendre que relativement à des bonnes personnes, des bons moments, des bons feelings, en toute spontanéité. Je ne pourrai plus planifier, me projeter. Je ne pourrai plus faire de plans sur une comète dont la forme, la trajectoire, l’idée même de son existence, me rend tantôt perplexe, tantôt empli de dégoût.

A l’amour j’y oppose le désamour, la rupture, la séparation. Mais à la guerre, aux viols, aux massacres, aux actes les plus violents et immoraux possibles et qui s’existent de plus en plus ici au fur et à mesure que l’humanité perd la raison, à tous ceux la, je ne trouve pas de contrepoids, rien, rien, rien. Nous avons un bras qui pèse infiniment plus lourd que l’autre et nous chutons inexorablement. Il y a des bonnes choses, mais on tend à les oublier. Des actes de bonté isolés, des sourires rassurants. Mais ils se font rares, si rares. Et c’est comme si, comme si ils profitaient de l’horreur ambiante pour exister. Comme si sans celle ci, ils n’étaient rien.