29.4.03

Prise d'otage

Je viens de voir qu’il existe une « american traitor list », composés de gens contre la guerre en Irak. 'Sont vraiment cons la bas quand même. On en est arrivé à un tel point d’intolérance. Je sais pas moi, ces types la ne disent qu’un truc : faites l’amour pas la guerre. Et les autres de vouloir les fusiller, de les lapider sur place public si ils le pouvaient. Les américains sont parfois les maitres de la pensée unique, les soi disant anti-nazis qui deviennent nazis sans s’en rendre compte. Des types qui se font endoctriner par les "Dieu sauve l’Amérique" de leur président à chaque discours. Ca fout les boules que la première puissance mondiale soit un régime non laïque, qui prend Dieu à chacune de ses actions. Ca prend l'allure de croisades et permet d'obtenir le soutient des masses. Car s'ils se foutent des raisons politiques, la religion, ça leur parle. On déconne pas avec ça.

La religion, c’est quoi d'ailleurs ? Au départ une instruction, détournée en une explication, une excuse salvatrice nous ôtant toute responsabilité sur nos actes et nos décisions. Un rejet de responsabilités, un « joker » face à l’incapacité de faire marcher sa petite tête et réfléchir au pourquoi du comment. Une mascarade, qui sous ses airs de grande prise de responsabilités vis-à-vis du paradis et de l’enfer, du bien agir ou mal agir, est en fait un mensonge, qui se révèle être un prétexte de libre agir pour les uns, et surtout de contrôle pour les autres. Disons que les gens qui y croient très fort sont soumis envers ceux qui contrôlent la religion, qui cela dit en passant s'enrichissent à mort. Ceux-la ont minutieusement étouffé le véritable sens de ces dogmes, à leur profit. Je doute que si Jésus était parmi nous il cautionne la richesse du vatican, le clergé, l'inquisition, le pape, et tous ces rites dignes des sectes les plus stupides et les plus éloignées de la vérité. Je pense plutôt qu'il botterait le cul du pape, avant de se casser aussi vite qu'il serait arrivé, dégouté en constatant les saloperies commises en son nom. Lui qui a voulu innocenter les hommes, leur donner une chance de faire le bien en prenant leur destin en main. Une poignée de trouillards a détourné son enseignement pour leur dire le contraire : les culpabiliser, leur faire peur, les soumettre à la fatalité. Toute résistance est futile. Et gare à ceux qui essayent de s'évader dans les rêves ou les plaisirs. Même le suicide est interdit. Toute vie est à eux. Même ce qui n'est pas né. Et gare à ceux qui essayent de trouver l'amour. Ben non quoi, faut pas déconner ils pourraient trouver la vérité qu'on a eu tant de mal à cacher ! Restez tous des chiens-chiens qui font crac-crac pour se reproduire (et c'est tout hein, sinon !), et qui se lavent sagement le cerveau tous les dimanches avant la quête.

Il y a ceux qui obéissent à la lettre, et puis les autres, majoritaires, qui se laissent guider volontiers par ces chefs "spirituels", ceux qui pratiquent sans trop y croire, ou qui croient sans trop pratiquer. C'est un moyen d'avoir la conscience tranquille et de continuer à foutre le bordel sans trop se soucier de ce qui va arriver. C'est de la lacheté non assumée, baignée dans de la paresse profonde, étouffée par l'énormité du voile géant que la religion plaque sur le monde. On préfère se dire que ces gens la pensent à notre place, ils doivent avoir raison, alors on peut vaquer à d'autres occupations. Ils Sous-louent leur matière grise en échange de tranquilité.
En gros, ils se disent : je ne peux pas agir mal, j’ai trop peur de l’enfer. Tout en sachant que l’enfer n’existe pas et qu’on peut faire toutes les conneries de la terre. En plus on a inventé pour eux une sorte de rachat, du style 10 coups de fouets, 10 je vous salue marie; du style célibat, du style pas d’alcool, du style je ne sais quoi pour se donner bonne conscience, et pour se dire que ça doit exister puisqu’on se fait chier à se flageller pour ça.Je sais pas moi, vous êtes grands, intelligents. On vous apprend la chimie, la physique, l’histoire, l’évolution, Darwin et compagnie. Et pourtant, il y en a qui, malgré leurs bonnes notes en histoire ou en sciences, croient dur comme fer, au premier degré, à Adam et Eve, au paradis par delà les nuages, aux premiers jours de la création, à l’enfer, à jésus qui marche sur l’eau en paréo, etc… ils croient dur comme fer à la forme de toute cette histoire invraisemblable à tous nos sens. TOC TOC, ya quelqu’un la dedans ?

Comme si tout le monde avait peur de quelque chose, peur de la vérité. Comme si celle-ci faisait trop mal, faisait trop peur. La peur d’être nos propres maitres. La peur d’avoir autant de valeur qu’une puce ou qu’un clébard. La peur d’être juste un assemblage de tissus et d’organes. La peur d’être une infime cellule composant le corps de la nature ou de l’univers. La peur de n’avoir absolument rien pour justifier nos actes. Ni religion, ni purgatoire, ni rien. Juste le bien, et le mal. Le bien entraine le bien, le mal entraine le mal. Voila. C’est aussi simple que ça. Pas besoin de se flageller, pas besoin de réciter la bible, l’équation est autrement plus simple. Amour, et c’est tout. Personne, personne n’a les couilles de prendre la responsabilité du bien et du mal. On veut juste vivre, procréer, regarder la télé, mais grand dieu, ne pas s’occuper du reste. On ne veut pas penser, réfléchir. Après tout, nous sommes insignifiants sur cette terre, et dans l’univers, alors je ne vois pas pourquoi j’aurais la carrure d’un maitre, d’un dieu. C’est ça qu’on se dit tous inconsciemment. Nos sens déduisent qu’on est tous petits, alors que notre raison nous crie qu’on est très forts. Alors on écrit et on crie qu’on est l’œuvre ultime de dieu, notre maitre, notre responsable, notre prétexte ultime du style « je fais la guerre en ton nom ». On crie haut et fort tout ça, qu’on est la perfection, seule raison d’être de l’univers, et on s’amuse, on joue à la guerre, on détruit toutes ces espèces inutiles et destinées à nous divertir, on s’aime, on se déteste, et on attend le jugement dernier, dernière fiesta avant de tous rentrer au paradis. On souhaite tous ça très très fort. On attend que papa dieu vienne nous chercher après la fête. Une fête assez flippante, certes, mais après tout on se sera bien amusé, on aime bien se faire peur.

Et non. En fait, papa ne viendra pas. Ya pas de papa. Ni de maman. En fait, on est le préféré de personne. Par contre, on a des milliers de frères, et on les massacre depuis tout ce temps. Et cet endroit-là, c’est notre maison, notre seule et unique maison. Et c’est pas une fête d’ailleurs, c’est juste la vie de tous les jours. Il n’y aura pas de retour à la maison, avec une femme de ménage pour nettoyer vos conneries. Non, on est ici chez nous, et il n’y a pas de femme de ménage. On doit prendre nos responsabilités. Et nous, tels des gamins, de chialer. Ouiiiiinnnn. Mais je sais pas faire la vaisselle moi. Comment on va faire bon dieu ! Tout le monde le perçoit cette situation depuis longtemps, en espérant que quelque chose arrange le coup. On s’est dit, on va foutre le bordel, de toute façon papa passera derrière pour nettoyer, tout en pensant de plus en plus que papa n’existe pas. Je crois que pas mal d’entre nous préfèrent le suicide collectif, plutôt que l’acceptation de notre nullité, de notre insignifiance, de la véritable taille de nos sexes, quelques micros centimètres comparés à l’immensité de l’univers. Nous ne sommes rien, une crotte intergalactique, une moitié de pellicule sur toute la chevelure de l’univers. Et on se sent tout petit. Chui tout p’tit chui d’la merde. Et on crie à l’aide, on appelle une maman qui n’existe pas. Non, non, le paradis n’existe pas. Nous sommes ici, et nous y resterons à tout jamais. A nous d’en faire un paradis.

On a tellement peur. Des petites merdes, mais qui, pourtant, ont la connaissance du bien et du mal. On voit nos bras tout petits, minuscules, et pourtant on a compris comment battre le record du monde du lancer du javelot. On se sent moches, aigris, terrifiés à l’idée de ce qui nous est confié. On ne se sent pas prêt, pas assez fort pour prendre la responsabilité du bien et du mal. On se regarde tous les matins dans la glace, habillés comme des pingouins, et on arrive pas à admettre qu’ici, c’est nous, dieu. On est trop moche, trop petit. Et on a tellement peur de cette responsabilité. On préfère s’amuser, se tirer dessus et baiser comme des lapins, insouciants, en pensant que quelqu’un rachètera nos fautes, ou bien que ce n’est qu’un rêve, qu’un passage avant le paradis, ou la mort, le vide, le rien où on pourra dormir en paix sans remords. Suffit d’avoir déjà embrassé une fille, caressé un chien, senti une fleur, ou même écouté de la bonne musique, pour savoir prendre cette responsabilité. Vous jouez aux forts, aux maitres de l’univers, et pourtant vous fuyez tout ce qui ferait de vous des maitres. Au contraire, vous embrassez tout ce qui fait de vous des faux culs, des connards, des putains d’enculés ignobles qui bruleraient en enfer si celui-ci existait.

Je pense qu’on est si intimement persuadé que nous sommes des connards, au fond de nous, qu’on se construit notre enfer. L’enfer, un lieu ou la température est insoutenable, un lieu où les gens sont brulés vifs. Un lieu à l’ambiance proche d’une centaine de bombes atomiques rasant la planète à quelques milliers ou millions de degrés Celsius. Comment même pouvez-vous accepter ça ? j’ai beau me le répéter, je suis toujours sur le cul de constater que quelques connards ont pouvoir de vie et de mort sur nous tous. Mais, Dieu, c’est eux ! ou plutôt Satan. Les seuls types capables de raser une ville ou un pays en quelques secondes. Si Bush était vraiment croyant, il éliminerait ses armes nucléaires sur le champ, et irait faire un câlin à Ben Laden. Il irait aussi mettre à sac le Vatican et proclamerait tout médicament gratuit. Il établirait une liste d’aliments gratuits, qu’il produirait et expédierait en masse à tous les affamés, en prenant les 80 milliards de dollars du budget de l’armée américaine.
Vous rendez vous compte de la stupidité de l’arme nucléaire ? Vous rendez vous compte que Boris Eltsine, un sombre alcoolique complètement gaga, s’est surement amusé plusieurs fois à se frotter le derrière contre le bouton rouge en sirotant sa vodka ? Imaginez-vous tout simplement que cet alcoolique notoire avait pouvoir de vie et de mort sur nous tous ?

L’arme atomique est une aberration qu’on accepte tous. C’est du domaine de l’acceptable, du normal maintenant. Alors que même le nombre de bombes dont disposent chaque pays est intolérable. 1 c’est déjà trop. Mais plusieurs milliers, de quoi faire tout péter je sais pas combien de fois, c’est absurde. C’est la course bête et méchante. Moi j’en ai plus que toi, na ! On est arrivé à la fin du premier tour de cercle. On arrive à l’arme suprême, l’escalade n’est plus possible. Alors il faut avoir le plus possible d’armes suprêmes pour être plus fort, quand bien même cette arme est inutilisable, puisqu’elle se retourne automatiquement contre nous. On a bouclé la boucle. L’arme suprême est inutilisable. Moins efficace qu’un lance-pierre, si l’on considère que l’efficacité dans une guerre et de faire bobo à votre adversaire, en restant, vous, indemne. Maintenant le seul type d’embrouille qu’on peut avoir, c’est plus : "arrête, sinon je t’attaque", ce serait plutôt "arrête sinon je nous fais tous péter". Comme n’importe quel preneur d’otage allumé. On est pris en otage, c’est bien le mot, et par des allumés qui se disent être nos représentants. Et ya personne pour nous sauver, pas de GIGN ou je ne sais quel miracle.

Alors nous tous allons griller… je vais griller… pour quel crime ? Celui de me réveiller chaque matin auprès de ma douce, de l’aimer, d’admirer ses faits et gestes autant que chaque partie de son corps. Le crime de m’émerveiller des petits riens de la nature et de la vie de tous les jours. Le crime d'aimer la musique, d’aimer le soleil, la mer, mes amis. Le crime de n’avoir véritablement jamais commis de crime. Coupable de je ne sais quoi, victime de je ne sais que trop bien.

28.4.03

Schyzophrénic school

Je rêve d’un monde ou les affiches de publicité, les slogans, refléteraient la stricte vérité. Un monde sans tromperie, un monde sans langue de bois, un monde ou personne ne tricherait pour avoir du "mérite". Mais ça, nous l’acceptons chaque jour. On voit "l’ADSL 20 mega à 9€", on est attiré, mais dans notre tête, nous savons très bien que les petites lignes en dessous infirmeront ces informations et dévoileront une affaire qui n’est bonne que pour celui qui l’émet. Car dans ce monde, il n’y a pas de bonne affaire, il n’y a pas de cadeau. Il n’y a que tromperie, arnaque et joute de faux semblants. Tout est tour de passe-passe, et nous adorons ce spectacle. On y croit à chaque fois. Nous avons une vie intérieure en brut, et une vie concrète en net. On est habitué à ça, à cette dissociation schizophrénique. Tête en l’air et pieds sur terre. On ne se croit pas capable de générosité, de bonne volonté, quand bien même nous nous projetons des films qui nous font rêver du contraire, à nous en émouvoir aux larmes. Quand bien mêmes nous nous passionnons d’écrivains, de dogmes, de chansons qui nous prouvent le contraire.

Nous avons transposé la réalité de nos actes, en petites lignes invisibles en dessous des mensonges publicitaires. Nos convictions, nos aspirations, nos quêtes sont devenues des petites lignes invisibles. Nous sommes devenus des petites lignes invisibles, tandis qu'une masse impersonnelle mais séduisante se montre à notre place. On croit le savoir, mais nous l'oublions. Car nous n'intégrons plus que les grandes polices, les couleurs vives, et les slogans tape à l'oeil. Nous ne savons plus lire les petites lignes. Nous sommes devenus des machines à avaler la soupe que l'on nous sert. Elle nous est indigeste, mais nous avons perdu le menu.

Ainsi nous voyons depuis toujours les hommes politiques déjouer toutes les questions intéressantes, en maniant la langue de bois, le faux-cul-isme, à la perfection. Ils ne répondent jamais, mais nous sommes contents, comme d’habitude. La langue de bois, le mensonge, est devenu une olympiade de tous les jours, dont nous nous délectons. Nous sommes accrocs, nous n’imaginons pas d’autres manière de faire. Nous sommes convaincus que nous sommes dans le meilleur des mondes, le monde libre. D’ailleurs nous appelons ça démocratie, ces gens qui nous mentent encore et toujours, nous les choisissons librement, oh oui, si librement.

Un monde où tout est illusion. Un monde où le député qui veut se faire élire, prend son courage à deux mains le jour où son élection est incertaine, descend dans la rue, se force à sourire chaleureusement, et peste dans sa tête d’être obligé de serrer des mains à tous ces cons, mais après tout, ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Un monde où la proximité et la franchise sont des mauvais moments à passer. Un monde de faux derche, un monde qui, si on en gratte la première couche, est une décharge à ciel ouvert. Un carnage, une torture morale, qui pousse parents et enfants à se shooter aux médocs, à se suicider, à se droguer, à agir bizarrement, violemment, passivement, un monde qui nous lobotomise et nous rend mauvais. Un monde qui nous laisse la schizophrénie, le mutisme, ou la drogue comme échappatoires. Un monde où la dépression est normalité, où elle est saine est nécessaire pour sa propre survie mentale.

Aujourd’hui cet art de dissocier les faits trouve son apogée dans ses extrêmes. Il y a les amateurs et les professionnels. Les amateurs c’est nous, et les pros, ceux que nous admirons, ceux dont nous fantasmons. Les tueurs en série, les violeurs, les dictateurs, ceux qui font de la négation de l’autre leur mode de vie. Eux ils sont en champion’s league et nous nous délectons de leurs exploits. Les reportages, les émissions, les films, les magazines, toujours plus centrés sur des sujets voyeurs, racolleurs ou scabreux, captent notre attention, fascinés que nous sommes derrière nos masques prudes. Des gens bien sous tous rapports qui fantasment sur l’immoralité, sur la brutalité. Pourquoi est on de plus en plus fascinés par les histoires de viols, de pédophilie, de torture ? Pourquoi repoussons nous toujours plus les limites des thèmes racolleurs dans notre société ? Parce que c’est nous, c’est notre destination. Notre prolongement. Nous sommes la pâte et ils sont la pizza. Nous sommes au péage ils sont déjà à la plage. Nous entrons au collège alors qu'ils célèbrent leurs diplômes.

Ils ont passé un cap, ils se sont fait happer tout entier par ce mode de vie, cette façon de compartimenter la réalité et de mépriser l'intégrité d'autrui. Si l’on veut être performant dans cette vie, il faut le faire ainsi, de manière brillante. C’est pas personnel, c’est le business, qu’on vous dit tous les jours, pour arriver à battre le chiffre d’affaire de l’année dernière en saignant toujours plus de clients. Ca n’a rien de personnel. Alors tout va bien. Je peux le saigner lui, et lui je peux le licencier, et rentrer chez moi la conscience tranquille. Vivre ainsi, c’est apprendre à refouler son désir d’existence. Tout trouve son explication, comme une cale magique sous une table aux pieds trop courts. Les SDF peuvent crever dans la rue, les somaliens mourir de fin, les roumaines faire le trottoir porte de Champerret, les gosses irakiens crever faute de médocs, les viets se faire griller au nom du bien, les occidentaux fournir toutes les armes aux pauvres pour qu’ils s’entretuent, ma voiture pourra continuer à détruire la planète, je pourrai continuer à aller me marier à l’église et sentir cette spiritualité qui m'envahit. Tout trouve ainsi son sens. Je n’aurais plus à rougir, me sentir coupable, non car tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. C’est le business, c’est pas personnel qu’on vous dit. Eureka.

Les plus "performants" refoulent totalement leurs sentiments. Mais comme deux mêmes pôles d’aimants se repoussent, on ne peut pas les plaquer ensemble indéfiniment. Le bouchon finit par exploser. Et la pulsion explose. On tue, on viole, on fait n’importe quoi. On ne contrôle rien. Et on vie comme ça, par à coups.
Si le monde est une feuille, et nos vies des lignes que l’on trace, il y en a parmi nous qui tracent leur ligne de vie de manière plus ou moins douce et continue. Il y en a qui se retiennent, et qui finissent par trouer la feuilles par pulsion pointillés. Des petits trous, des grands trous. Des fantasmes ou des actes. Des coups ou des tortures.

Je ne pense pas que le sadisme soit inné, ou si peu. Nous avons tous un désir de ressentir le bien, d’être rassurés sur notre existence. Nous partageons tous ce même savoir, cette même expérience qu’est la douleur, et nous avons tous ceci en commun de la haïr. C’est ce qui nous soude et nous connecte. Nous faire du mal entre nous, ne peut être un mode de vie sereinement accepté. Ce mal vous rattrapera en stress, en cancer, en ce qui finira par vous ramener à l’équilibre naturel des choses. Le mal entraine le mal. Le mal que l’on fait, que l’on répand, va inexorablement nous revenir à la gueule. C’est juste une question de temps.

Nous sommes poussés à nous autodétruire, rongés par la honte d’être incapables de prendre en main notre monde, fuyant nos responsabilités d’en faire un paradis, nous qui nous sentons insignifiants face à l’ampleur de la tache qui nous incombe. A nous de créer le paradis, de savourer l’amour, de prôner l’altruisme, la vérité, et tout ce qui nous touche et nous rend meilleur. Nous avons le savoir pour découvrir l’atome, créer l’arme absolue, voyager dans l’espace. Alors nous avons aussi le savoir, la science infuse pour optimiser l’amour, pour amener la création de tout ce qui est bon. Nous sommes les artisans du paradis en puissance. C'est à ça que sert la connaissance du bien et du mal. Mais on ne se sent pas d'assumer cette tâche. Pourquoi ? j’en sais rien. On a un gros complexe d’infériorité, qu’on masque en se surexposant. Comme toutes les grandes gueules qui compensent leur petite taille ou leur manque de confiance. On se prend pour des dieux car on se sent comme des tocards. On assume que dalle. Peut-être parce qu’on craint la douleur et la mort. On flippe d’avoir les idées de dieu dans un corps si pourri. Comme si Mozart devait se contenter d’un triangle ou Zidane d’une balle de ping-pong. Bon dieu de merde faites qu’on retrouve ce ballon de foot.

10.4.03

Disarming Irak

On peine à distinguer le bien du mal. Car ce que l’on se dit tous, c’est que finalement, la guerre en Irak a fait du bien, car ces gens sont maintenant libres, en démocratie. Finalement, les américains ont eu raison, on a peut être été trop loin en les faisant chier dans leur entreprise de faire la guerre. Et on zappe la forme de tout ça. On oublie les faux prétextes, les demandes de rapatriement des corps américains enterrés en France, les accusations lamentables. On oublie les aberrations qui se cachent derrière tous les prétextes de cette guerre comme ces armes qu'on ne trouvera jamais malgré les preuves et photos satellites révélatrices du début. Preuves irréfutables que le CIA maitrise Photoshop.
On oublie que Bush manie le "dieu bénit l'amérique" aussi spectaculairement que le "sig heil". On oublie qu’il ne tend toujours pas l’autre joue. On oublie que ce pays comble de la liberté sait aussi imiter la plus stricte des dictatures. On oublie les "freedom fries", la pensée unique, la propagande à la Goebbels, le refus de dialogue, le rejet, le lapidage de ceux qui sont contre. On oublie qu’ils en sont devenus intégristes de la liberté, de même que l’inquisition était intégriste de la parole de dieu. Quand les extrêmes se rencontrent, on ne distingue plus le bien du mal.

Cette guerre aura finalement choisi son prétexte à la fin, la liberté du peuple irakien. Certes, c’est bien. Je ne pense pas que leur autre liberté sera mieux. Je ne pense pas non plus que ce fut le véritable prétexte. Sans quoi les Etats-Unis devront délivrer toute la surface de la terre. Des ignominies, on en trouve partout. Y compris chez le peuple majoritaire, la Chine. Avez-vous déjà vu les images de pensionnats d’enfants abandonnés, nés illégalement en entravant la loi de l’enfant unique ? Et Poutine qui massacre les tchétchènes. Et la peine de mort aux Etats-Unis ? Les soldats américains se sont dit dégoutés par la richesse des palais de Saddam Hussein, comparés à la misère du peuple. Ont-ils vu la misère de leur propre peuple ?
Un dictateur en moins, c’est bien. Un virus de moins. Mais la machine est toujours malade, et toujours aussi perméable aux autres virus. Et je n’appelle pas "réussite" la mort et les souffrances d’hommes et femmes qui n’y sont pour rien, qui n’ont pas le pouvoir de décision.

Je voyais sur un site, la liste des morts américains au combat. A la télé américaine, on pouvait la voir défiler, accompagnée d’une douce musique divine. On y voyait pas les noms des soldats irakiens, ni même des civils innocents qui ont péri. Ceux-là n'ont ils pas droit à une musique ? Je croyais que le monde occidental pronait la compassion, la justice, la liberté, l'égalité. Pourquoi s’emporter aussi à la vision d’images de prisonniers de guerre américains alors que l’on voit tous les jours des cadavres irakiens a la télé, ou autres prisonniers torturés de Guantanamo.
Hier, sur un forum parlant de la guerre, quelqu’un a posté une photo, accompagnée du titre " disarming Irak". "En désarmant l’Irak". Sachant aussi que "arm" signifie "bras". On pouvait donc aussi traduire "en démembrant l’Irak". C'était gosse irakien qui n'avait plus de bras, juste des pansements. Puis d’autres photos, de lynchages, de sang, de cadavres. En voyant ce gosse, je me suis mis à pleurer.