Vitalogique : comprendre ce qui nous entoure

1.7.08

Half Life

Pourquoi continuer ? Que faire ? D'ou vient ce sentiment d'implacabilité ?

Je crois que les complots que l'on dénonce ne sont pas des complots voulus. Je les perçois comme subis, inconsciemment menés comme un moyen naturel de survie. Les habitants du tiers monde seraient par exemple en droit de dénoncer un complot des citoyens occidentaux à leur encontre. Or, chacun d'entre nous ne se sent pas être un conspirateur machiavélique. Les plus fortunés d'entre nous sont persuadés du bien fondé de l'économie, de la croissance, de la nécessité des privatisations et des créations de richesses. Peut-être que certains puissants s'envolent dans leur rêve de complot occulte et de pouvoir diabolique. Je pense toutefois que l'écrasante majorité de ces gens est inconsciente du mal qu'elle fait. Je perçois ces gens comme une volonté inconsciente de pouvoir et d'autodestruction. Comme si nous étions tous manipulés par l'existence toute entière.

Malgré tous les probables comploteurs, je commence à voir le monde comme un tout, qui se défend, et peut-être nous manipule tous. Un monde qui a besoin de nous cacher la vérité pour subsister. Je sais pas. Je ne crois pas aux théories du complot telles qu'on nous les présente. Je ne crois pas que des hommes puissent être aussi machiavéliques pour mener de concert la Terre à sa perte, qui plus est avec une telle efficacité. Je crois surtout aux gens égoïstes. Aux gens qui ont peur. Aux gens orgueilleux. Et tout ça sur fond d’ignorance profonde. La méchanceté, le sadisme, c’est de la tristesse qui s’exprime sur fond d’ignorance. Au fond, on finit tous par avoir des enfants, ou des amis. On finit tous par aimer et être aimés. On désire tous ça. On est tous unis face à cette même saloperie qu’est la souffrance. Nous sommes tous unis face à la mort et l'angoisse solitaire qu'elle suscite en nous. Nous sommes tous la, entre nous, mais dans notre tête nos sommes seuls. Qu’on se tienne la main, qu’on se parle ou qu’on s’étreigne, nous sommes seuls. Nous vivons cette expérience séparés les uns des autres, chacun dans sa peau, chacun dans sa tête. Et la mort, la fin, nous y aurons tous droit, seuls. Chacun face à ses peurs.

Peut-être que les plus puissants d’entre nous tentent d’y échapper, de manière illusoire, en nous mettant dans la merde. Enfoncer les autres, c’est aussi une manière de s’élever. Peut-être est-ce la vie en général qui amène des gens à nous conduire ainsi à notre perte. Peut-être est ce un mécanisme d’auto-défense pour nous réduire au néant. On s’est aventuré trop loin, on a créé le déséquilibre, on a foutu la merde. On aurait pas du en savoir autant. On n’est plus adapté à ce monde, à cette vie. On veut plusse. On arrive à calculer notre sort, on pose trop de questions et on est sur le point de découvrir le pot au roses. A mesure que les réponses affluent ou manquent, notre sort se scelle. Nous devons disparaitre pour que l’existence tienne la route.

Les illuminatis et les comploteurs, s'ils existent, sont peut-être un processus « automatique » d'extinction de l’humanité. Un reboot par des robots. L’ironie du sort serait que les gens qui espèrent vaincre leur sort en contrôlant les humains, seraient en fait les plus manipulés d’entre nous. De toute façon on le saura bien assez tôt, la calotte glaciaire tiendra pas longtemps. Et puis s'il existe vraiment des gens assez machiavéliques pour nous amener volontairement la où on va, alors, c’est la merde. Alors ils auront sur le poids de leurs épaules toute la souffrance du monde, de tous ces siècles. Si vraiment des salopards dissimulent les énergies libres, spéculent et s’enrichissent sur les guerres, animent les trafics en tous genres, entretiennent la misère du monde et le voile opaque qui cache la vérité et les belles choses, alors, c’est la merde. Je peux pas croire à ces gens la, admettre leur existence, c’est renier tout espoir pour l’humanité. Ce serait admettre que tout ça se résume à une guerre du bien contre le mal, comme on veut nous le faire croire aujourd’hui pour chaque conflit. Mais je ne crois pas à ça. Car je sais que j'aurais pu naitre n'importe où. Je reconnais les moments de ma vie où un rien aurait pu me faire basculer. Un jour, j'ai failli tuer mon chien, par colère. Un autre jour, j'ai failli passer à côté de la femme de ma vie, par lâcheté. Je reconnais les évènements, les personnes, les objets, les circonstances qui ont fait de moi ce que je suis. Je reconnais les évènements, les choix, les idées qui auraient pu m'entrainer ailleurs et faire de moi une personne amère, triste, revancharde. Si je ne le suis pas, c'est avant tout parce que j'ai reçu de l'amour ? Parce que les expériences que j'ai traversé m'ont amené à réfléchir sur sa nature et à le préférer à tout autre sentiment ? Comment blâmer les hommes qui ne connaissent pas l'amour ? Ce serait appliquer une double peine. Je ne pense pas, de tout mon être, qu'une personne qui ne connait pas l'amour, le vrai, puisse se former sereinement.

Avez vous déjà connu une personne qui malgré tous vos mauvais actes, toute votre mauvaise conscience, agit envers et contre tout, dans votre intérêt, sans se soucier des siens ? Avez vous déjà été mis au premier plan ? Avez vous déjà été mis en confiance, dans l'assurance d'être quelqu'un de bien et de primordial ? Avez-vous déjà été ému par quelqu’un et par ses intentions à votre égard ?

Le jour ou j'ai décidé d'être quelqu'un de bien est le jour ou j'ai choisi de faire du mal à cette personne. Parfois pour faire le bien, il faut faire du mal. C'est la le seul mal que je reconnaisse. Le défaut d'amour.
Car comme je le disais, je ne crois pas au mal. Je ne crois pas à la méchanceté. Je ne crois qu’à la tristesse, la solitude et l'ignorance. Je ne crois qu’à la peur de mourir. Je ne crois qu’à la peur de souffrir et de se retrouver seul, tôt ou tard, face à l'inconnu. C’est cette même peur qui unit tous les être vivants. Et c’est la façon dont on l'appréhende qui nous distingue.

Nous sommes tous capables de nous émouvoir de la mort de je ne sais qui. Que ce soit un individu ou cent mille à la fois, c'est pareil. C'est la mort. Ca fera la une du journal plus ou moins longtemps, mais ça fera la une. On est tous généreux en compassion dès qu'il s'agit d'évoquer la mort de quelqu'un. Les gens retrouvent tout leur crédit quand ils meurent. Et on pleure. Mais qui pleure-t-on ? Pleure-t-on sur leur malheur ? Où le notre ? Est-on jaloux ? Putain ils l'ont fait ! Et nous on est encore la ! C'est ça ?

Tout ça se résume à une crise d’hystérie généralisée. On est hystérique à l'idée d'y passer. C'est dégueulasse. On sait pas quand ça va se produire. Si ça fera mal ou pas. On sait juste qu'on sera tout seul. Seul face à ses pensées, face à ses actes, face à ses souvenirs. Seul face à ce connard suprême qui nous a foutu dedans.
C'est dur putain c'est si dur. Est-ce que j'aurais pu mieux faire ? Suis-je libre d'avoir pu mieux faire ? Si je reconnais les évènements qui m'ont façonné, aurais je pu prendre d'autres chemins ? J'ai parfois l'impression que nous n'avons pas de choix à faire. Qu'est ce qu'un choix, si ce n'est l'expression de nos expériences personnelles et collectives, filtrées par nos perceptions propres. L'expression de notre individualité. Comme si chaque cellule de notre cervelle pouvait faire des choix à elle. Je nous vois comme ça. La somme de nos conscience, la somme de nos existences, je vois tout ça comme une conscience géante, un big cerveau en modèle holographique. Chacun d'entre nous aurait un accès au tout, alors que chacun d'entre nous en serait une partie. Je ne crois pas au choix libre. Pas ici. Pas dans un monde de cause à effet. Pas dans un monde de passé à futur. Je crois que nous sommes ici pour comprendre ces choix qui sont pris d'eux mêmes, exprimant le but qui nous guide. Intégrer les causes, comprendre les effets. Et façonner l'existence. Elle prend corps en nous, à travers nos esprits. Quand quelqu'un me dit et essaye de me convaincre qu'il a le libre arbitre, je vois un robot qui me dit "j'existe", "je suis moi". Certes nous avons parfois des comportements irrationnels, mais le sont ils vraiment ? Peut être à un niveau individuel. Mais au niveau collectif, tout a l'air de s'emboiter parfaitement. Comme si les effets que nous percevons comme des créations avaient en réalité des causes cachées et produites ailleurs, en dehors de toute connexion rationnelle. Vous savez, comme ces particules qui sont liées et qui peuvent réagir à distance, au mépris des lois de la physique.

Je vois le monde comme une relation global de cause à effet. Un but qui déroule son entropie, et se décompose en causes et effets. Un scénario qui passe dans une machine qui code tout ça langage début-fin, cause-effet. Nous en sommes les catalyseurs, les acteurs, avec nos débuts, et nos fins. En semi liberté. Une moitié de conscience, et une moitié d'automatisation. Une moitié pour nous mêmes et une moitié pour le projet global. Tout ne se résumerait qu'à un vaste océan de probabilité. Notre libre arbitre en serait dépendant. Nous sommes libres, dans la limite des probabilités acceptables, dans l'optique de la réalisation du but initial et final. Celui qui s'exprime à la fois comme début et comme fin. La raison.

La raison de notre existence ? La raison. Le but c'est la raison. La cause c'est le but. Nous sommes entrain de décider si ça vaut le coup ou pas. Si nous devons rejeter l'existence ou pas. Nous sommes entrain de naitre. La gestation terrestre va prendre fin.
Vous avez jamais remarqué qu'on confond toujours les causes et les buts ? Pourquoi ? A cause de... parce que... On répond toujours par des causes aux questions qui demandent des buts. On répond toujours par des causes aux questions qui demande des sens. Or qu'est ce qu'un sens qui ce n'est la désignation d'un point d'arrivée, un but à atteindre ? Nous sommes animés par un but invisible. Nous ne voyons que les causes. Mais la cause primordiale, elle, est aussi invisible, cachée derrière le mur de Plancke. Planckée dirons nous ?! Nous comprendrons et maitriserons notre existence quand nous en aurons compris le but. Le but qui en est la cause. Le sens de la vie, le sens du temps. Celui qu'on ne remonte pas. Nous ne pouvons le remonter car nous sommes "codés" en début fin. C'est un "one way ticket". Il faut le percevoir dans sa globalité. Percevoir le tracé du chemin parcouru.

Quant au libre arbitre, nous pouvons l'effleurer de temps à autre. Quand nous sommes à notre summum de conscience de nous même. C'est ça qui caractérise notre condition. Nous sommes conscients de nous mêmes. Notre spécificité humaine ne se révèle que lorsque nous sommes conscients d'être conscient. C'est uniquement à ce moment que nous sommes capables de grandes choses. C'est en éveillant nos consciences, en les élevant et en les entrainant, que nous arriverons à être de plus en plus maitres de nous mêmes. Je crois que c'est ça, le but. La conscience de l'être. Nous sommes entrain de décider si l'existence mérite d'être. La somme de nos consciences, la somme de nos émotions, la somme de nos peur. Tout ça en équation. Nous nourrissons l'existence, nous la nourrissons en concepts, en émotions, en sensations. Nous l'inventons chaque jour alors que nous pensons être son produit. Je pense donc je suis, je suis donc je pense. Et quand je pense au fait que je pense, et donc, que je suis, un cap est passé. Quand l'existence prend conscience d'elle même. Comme si nos ordinateurs se reveillaient et se mettaient à fonctionner d'eux même, en reconnaissant qui tappe au clavier et qui appuie sur power.

Notre vie est partagée. Notre organes fonctionnent d'eux mêmes, mais nous contrôlons nos membres. Nous savons viser, mais nous ne visons pas toujours juste. Nous ne maitrisons pas tous les aléas. Le hasard fait qu'une pièce retombe toujours, au bout de plusieurs lancers, à peu près à 50% sur chaque face. A peu près, car la perfection n'est pas parfaite. En elle doit résider une imperfection qui la sublime. Nous luttons pour prendre conscience à plus de 50%. Pour avoir ce contrôle. C'est ce qui exprime cette guerre contre Dieu. Nous voulons plus de pouvoir. Moins de hasard. Plus de justice. Moins d'aléas. Le bonheur que nous avons acquis, accumulé, les organes et objets que nous avons inventés et greffés à nos existences pour les parfaire, nous les voulons comme acquis. Nous avons valorisé l'existence, par nos esprits riches. Nous avons catalysé l'existence, à travers les arts, les disciplines, les sentiments. L'amour. Nous sommes capables de nous donner de façon inconditionnelle. Nous sommes arrivés au stade de l'existence ou un être peut sa vie à une autre personne. Lui donner tellement d'importance, qu'il est prêt à oublier le fait qu'il pense, donc qu'il est. C'est une connection qui reconnait l'existence de l'autre, et brise ce sentiment de solitude qui nous isole chacun dans nos têtes. C'est une connexion qui est comme une mutation de ce qui caractérise le sentiment d'existence. Une nouvelle version, qui se nourrit elle même. Nous existons entre nous, à travers l'amour que l'on s'échange. Alors, notre "créateur" pourrait se dire victime d'un cancer, ou bien trouver ça cool. J'en sais rien. Pour savoir, il faut qu'on trouve le but. La raison. Décider où tout cela nous mène. Car si dans la globalité, c'est lui qui décide, il ne faut pas oublier qu'il est la somme de nous. Et donc, c'est à nous de jouer. Chacun a son rôle à jouer. C'est la somme de nos actes qui façonne notre destin. On peut dire à chaque election que si on ne vote pas, ce n'est jamais qu'une voix de moins, et que ça ne changera rien. Reste que dans la globalité, c'est la somme de nos voix qui change le cours de tout ça. C'est ça, Dieu. Cette chose impalpable et incompréhensible qui s'échappe après le constat suivant : Une voix de moins ne changera jamais rien à la donne. Et pourtant, si. Dieu c'est ça. C'est la somme de nos décisions, prises collectivement de façon inconsciente. C'est la somme de nous, de tout ce qui est. Il est l'idée que nous sommes, nous sommes l'idée qu'il est. C'est une part de lui en tout cas. 50% je dirais. Il maitrise une partie de nous, et nous maitrisons collectivement une partie de lui. Nous luttons comme à pile ou face. La victoire se joue aux quelques pourcents qui penchent d'un côté ou de l'autre. Ce sont des pourcents qui sont régis par ce qui est probable, voulu, propice, désiré. Il va falloir méchament vouloir pour l'emporter.

S'il peut nous aider, s'il peut nous sauver, il ne le peut que par nous. C'est à nous de le faire, de proche en proche. C'est une lutte de tous les jours. Puis pour l'emporter nous devons plaire à son autre partie. Celle qui se nourrit de nous et emprisonne nos âmes. Celle qui ne réside absolument pas ici.

31.5.08

In God we trust (3/3)

Deus Ex Machina

On est en droit de se demander si on ne subit pas un complot. On se méfie de nos voisins, de nos collègues, en réalité on imagine et dénonce volontiers des conspirateurs partout autour de nous, à proximité. Il veut voler ma place, il envie ma nouvelle voiture, il veut piquer ma femme. Mais adhérer aux théories du complot à grande échelle et accepter que ceux qui ont droit de vie et de mort sur nous puissent en être, alors ça non, c'est à ranger dans le placard de la ringardise inacceptable que l'on moque volontiers. On ouvrirait pas sa porte à un mendiant, un voisin, parfois même à quelqu'un de sa famille. Par contre on donne les clés de son alimentation, de sa santé, de sa liberté de mouvement et d'expression. On donne tout ce joli trousseau constituant notre vie à quelques inconnus. On le donne parfois volontiers en faisant preuve d'une inconscience totale, on le donne souvent à contrecoeur, en fermant les yeux sur les risques. Car ces risques sont au-delà de ce que nous sommes capables de comprendre.

Comme si c'était trop dur. Trop dur d'intégrer le fonctionnement stupide et sans issue de notre société. Alors il faut qu'une partie soit invisible, mystérieuse, et confiée à "plus haut" que soi. Il faut se résoudre à ce qu'il y ait des gens d'en haut qui s'occupent de tout ça. Et bien sur, ils ne peuvent être qu'honnêtes et doués d'une moralité sans faille. Immaculés. Pas comme ce connard de voisin ou cet enfoiré de collègue qui veut piquer votre job.

On apprend dans nos livres, à nos enfants, que la monarchie absolue, la dictature, le totalitarisme, le fascisme, c'est pas bien. Dans le même temps, à ces mêmes enfants, on leur inculque la prévoyance, le scepticisme, et même la méfiance. Fais attention quand tu traverses. Parle pas aux inconnus. Prépare ton avenir, mets de côté. Blablabla. Ils ont raison. Mais par pitié faites ce que vous dites.
Qu'est ce qui fait que des gens intelligents, intègres, honnêtes, aimants, puissent choisir de nous envoyer dans le mur ? Parfois même en se pinçant le nez, reconnaissant à peu près que le candidat choisi dépasse les limites. Je crois que leurs yeux sont différents. Ils ont des dizaines d'années de vie. Des dizaines d'années à travailler, durant les 70', les 80', les 90'. Des années de dur labeur, en plein boum technologique. La richesse de notre environnement direct nous a sauté à la gueule. La radio, la télé, la voiture, l'ordinateur. Comme si on vous branchait plein de nouveaux organes. Un esprit attentif fait attention quand il signe un contrat. Un esprit préoccupé, ou tout simplement occupé, passe son tour. Vous n'avez jamais fait ça ? Prendre une décision à la va vite, en se disant "c'est bon, ça va passer", tout en sachant bien que vous offrez une possibilité de vous mettre à terre. Rouler à tombeau ouvert. On fait tous ça, dans nos vies débordées. Quand on achète un appart', à un moment donné, on ne comprend plus ce qui dit notre banquier, et on a envie que ça passe. On signe et puis c'est tout. Si ça se trouve, quelques paragraphes expriment votre ruine prochaine, mais vous ne pouvez y croire. Vous êtes confiants et bienveillants par nature. Pourquoi me voudrait-il du mal ? Vous avez beau être quelqu'un de raisonnable, vous faites un deal avec vous mêmes pour passer l'éponge sur une décision tout à fait inconsciente.

Dans nos vies comblées de soucis, nous n'avons pas le temps ni la force d'en accepter d'autres. Nos parents ne maîtrisent par leurs nouveaux organes assimilés à la va vite. D'ailleurs, c'est le contraire qui s'est produit. Ils se sont fait assimiler. Ils regardent et écoutent machinalement, sont de venus des robots, des machines à consommer, et à être façonnés. Façonnés pour vivre l'absurdité de la société. Ils sont eux mêmes devenus des organes passifs au sein d'un corps unique. Tous ces objets qu'ils accumulent ont finis par les posséder tant ils en sont dépendants.

Mes parents sont des gens biens, aimants, altruistes. Doués de bienveillance. Mais ils votent comme des salopards. Ils n'ont rien contre les racailles, ils sont juste confiants. Confiants envers les gens d'en haut. Confiants envers les hommes politiques et leur voix, la télévision. Ils n'ont pas l'impression que leur vote, ou leur soumission, me fait du mal, et leur fait du mal à eux aussi. Ils n'ont pas l'impression de faire du mal aux autres. Ils appuient sur un bouton, c'est tout, et ne veulent pas croire que cela déclenche une réaction de violences en chaînes. On peut discuter, on peut constater ensemble, mais le retour en arrière, la reconsidération, est inconcevable. Ils n'ont pas la force, ni même plus l'idée de remettre en question ce fonctionnement. Car se remettre en question, lorsqu'on a passé un certain point, c'est une petite mort. La remise en question, ça fonctionne chez les gens solides, et qui sont assez ouverts, pour évacuer justement l'énormité qu'il faut sortir de soi. Solide, car une idée, une opinion, un mode de fonctionnement, lorsqu'il grandit en nous, avec nous, est intégré, prend corps, comme un réflexe, un fondement. Comme regarder la télévision est un réflexe. Comme fumer peut devenir une accoutumance. On ne pense même plus à d'autres alternatives que nos hommes politiques. Ils sont là et c'est tout ce qu'il nous faut. Le penser-vite, l'acceptation sans condition est notre nouveau réflexe. Nous croyons ces belles images et ces gens qui viennent jusque chez nous chaque soir nous informer. Nous voulons croire ces prêcheurs qui nous annoncent des jours meilleurs. Il y en a pour tous les goûts, dans toute les langues, même l'espoir doit se perdre parmi les idoles et les dogmes vides de sens. Rien ne doit sortir du cloisonnement des simulacres.

Le savoir nous est interdit, mais nous avons besoin de croire, de nous raccrocher à quelque chose qui ne semble pas friable, qui est fixe, qui ne bouge plus. Car ces dernières années nous ont tous choqués. Les informations nous entourent, interfèrent partout. Il y a tellement de choses à intégrer. Pensez vous, l'homme et sa cervelle ont mis des milliers d'années à évoluer, mais depuis quelques années, on peut tout savoir, tout connaître. Nous pouvons appréhender tous les savoirs, toutes les sciences, comparer les dogmes et les religions qui s'offrent à nous.
Encore et toujours des simulacres, érigés en remparts par des hommes de pouvoir. Nos désirs de compréhension, de savoir, de spiritualité, sont définitivement balayés par ceux que nous nommons les gardiens de la foi. Ils scellent notre ignorance. Si les banquiers et l'argent expriment l'absence de confiance, le pape et ses congénères expriment l'absence de Dieu. L'absence d'espoir. L'absence de vérité. A quoi bon la chercher puisque nous leur sous traitons ? Pire, on nous la cache même au delà de nos instincts d'amour et de joie. On nous l'interdit. On nous soumet à l'obéissance de livres qui nous conduisent sur le chemin inverse. Comme si Dieu pouvait répudier la femme, comme si Dieu pouvait privilégier les hommes et leurs idoles, comme si Dieu pouvait condamner les seuls sentiments qui nous font espérer, et qui rendent notre existence tolérable. La vérité, c'est que pour un homme, Dieu est une femme. La vérité, c'est qu'on n'effleure celle-ci qu'en faisant l'amour. Et que l'amour émancipe de tous les simulacres. Il décuple nos forces et brise toutes nos chaînes. Il est l'ennemi mortel de nos ennemis, et en cela il doit être rendu inaccessible. Transformé en partouze, ou relégué aux happy-ends des contes les plus improbables.

Tout n'est que simulacres dans ce système qui n'est que l'ombre de ce qu'il se dit être, à l'opposé de ce à quoi nous aspirons. A cause de l'argent-dette, un moyen est devenue notre fin commune, et nos fins sont devenus des moyens. Les êtres sont devenus des avoirs, et les acquisitions constituent nos êtres. Les apparences sont devenus des édifices. Tandis que les fonds, les bases, les rocs, sont devenus transparents. On vend nos âmes pour quelques billets. On préfère la compagnie d'un riche benêt plutôt qu'un pauvre érudit. La beauté de l'âme a disparu derrière l'esthétique. On rêve de botox et non de pleinitude. Ce tour de magie universel a commencé par transformer le papier en or, puis en confiance, en certitude, en accomplissement, en réussite, en pouvoir. Il nous a promis d'ôter cette peur de vivre que nous connaissons tous, et nous avons accepté de plonger au pays des rêves. Comme quand on vend son âme, le rêve ne dure qu'un temps, et la réalité reprend le dessus.
Nos instincts, nos intuitions, nos inconscients, décèlent que quelque chose ne tourne pas rond, tout en participant à cette mascarade. Ca nous démange à un endroit qu'on atteint pas, sous le plâtre ou au milieu du dos. Ca nous gratte au fond de nos coeurs et et derrière nos consciences.
Cela nous est très éprouvant. Nous ne pouvons conduire nos vies et regarder le paysage en même temps. Nous ne maîtrisons plus nos vies. Nous avons été comme télétransportés dans une voiture folle, sur le siège du pilote. Le temps d'avoir apprécié la sensation de vitesse, la surprise est maintenant passée. Maintenant vient le temps du contrôle. De la maîtrise. Nous avons inventé le mot simulacre. Nous sommes donc capables d'en reconnaître les effets et pouvons reprendre le dessus.

La remise en question est la clé de la juste perception des évènements. Mais cette remise en question a été judicieusement écartée du mode de vie de l'homme moderne. Personne n'en fait preuve. C'est un sentiment interdit. Il exprime la faiblesse, la couardise ou la trahison. Non, ce privilège, on le réserve à Dieu, après tout ça. Tout ce qu'on vous demande, si vous vous sentez coupable, c'est d'aller vous confesser, de faire un peu de sport, ou de prendre des antidépresseurs. Se remettre en question, c'est comme abattre un mur de votre maison. S'il en est un élément fondateur, vous pouvez vous écrouler. Et ça, personne n'est prêt à le faire. Personne n'est prêt à s'écrouler. Certains peuvent encaisser une cloison qui tombe, certains hommes particulièrement solides et intelligents peuvent accepter d'écrouler une partie d'eux mêmes, de repartir à zéro. Mais la plupart d'entre nous n'ont pas confiance en eux. Dans ce monde de concurrence effrénée, régi par la critique destructive, la comparaison et le jugement, nous n'avons pas confiance en nous. Nous jouons derrière des masques, paraissant surs et confiants. On se bat entre nous alors qu'on voudrait s'arrêter pour constater le paysage difficile, dénoncer les promoteurs du combat. Le système n'accepte pas la faiblesse, il la nie. Il ne pardonne pas les genoux à terre. Perdre un de ses piliers fondateurs n'est pas concevable. On préfère continuer, aller de l'avant, quitte à aller dans le mur. C'est un réflexe de survie, lorsque la remise en question exprime la mort d'une partie de nous. Parfois une partie de nous que nous détestons, mais que, par réflexe, nous défendons bec et ongles.

Nous sommes aussi prisonnier du mimétisme que l'on nous insuffle. Nous nous regardons, sans cesse. On est tous perdus la dedans, notre instinct ne marche plus dans cet endroit. On ne sait pas ce qu'il faut faire. Comme la première fois qu'on mange avec des baguettes, on regarde autour de nous ce qui se fait. Est ce que ça aime ? Est ce que ça tue ? Est ce que ça critique ? La vérité c'est que nous sommes tellement dépendants et rendus irresponsables, que nous nous imitons comme des mômes incertains. Le paradoxe veut aussi que nous soyons des tueurs à gage de l'économie, entraînés à nous saigner, à soutirer le moindre sou qui s'accrocherait à une poche, mais nous sommes devenus dociles, gentils, soumis. Nous critiquons si peu. Nous refusons tout combat réel, nous battre est un si lointain réflexe. Nous sommes devenus des individus de consensus. Des caniches qui deviennent des loups quand on leur ordonne. Et qui font leurs besoin là ou il faut. Ce consensus qui nous habite, ce mimétisme qui nous lie, ignore la remise en question, quand bien même nous l'appelons de nos prières.

Pourtant, se remettre en question, ce n'est pas difficile. Lorsque l'on est entouré, appuyé. On peut se passer d'un muret, d'un mur, d'un pilier, parfois même de tout un édifice, tant que d'autres vous soutiennent un temps. La solidarité, l'entraide, la compréhension. On peut tous mal agir dans sa vie. On peut tous être du côté des coupables, avant de changer. On peut tous changer. On peut être une ordure sans nom avant de devenir un saint. Les ordures expriment souvent les ordures qu'ils ont reçu, ou jouent le jeu de l'ordure qui nous sert de lit. On suit notre modèle de concurrence, notre modèle de jugement des autres. Car ici, on juge avant de comprendre. On juge à la naissance. Car les promoteurs du combat ont besoin de camps. Au moins deux. Les bons et les mauvais. Comme je l'ai déjà expliqué, ceux qui ont pris les rênes de l'humanité, hors de notre volonté, les ont pris malgré eux. Comme des petits chefs incompétents, ils rejettent la responsabilité sur les sous fifres. Il est trop incommensurable pour eux de reconnaître la taille de leur adversaire. Ce serait surtout reconnaître la leur. L'univers est trop grand, Dieu est trop fort. Ils sont si petits, et pourtant ce sont les chefs du monde. Ils maîtrisent tout et rien à la fois. Ils ont réussi à se hisser jusque la, et sont toujours des crottes périssables. Alors il faut que les sous fifres prennent la responsabilité du mal à leur place. Et que les autres les canalisent. Comme dans tout combat, dans toutes guerres ce sont les promoteurs qui gagnent et y trouvent, cela est triste à dire, de l'intérêt. Pendant que les camps engagés s'entretuent, se régulent, s'occupent, une minorité contemple et joue à Dieu. Mais pendant ce temps, l'autre, le vrai, que fait-il ?

Quand reprendra-t-il sa place ? Pourquoi laisse t-il des gamins apeurés et irresponsables occuper sa cabine, prendre le volant ? Existe-t-il ? Une forme de justice divine est elle concevable alors que nous voyons tant de catastrophes hasardeuses ? Ces ordures auront ils raison de l'humanité en la soumettant ? Quand on quitte sa place, on ne peut pas s'étonner de voir les plus avides, les plus gourmands, l'annexer. L'avidité vient du manque, et les plus en manque d'entre nous ont un besoin vital de contrôle, de pouvoir. Toujours plus de pouvoir. La fatalité ou le hasard ne sont pas acceptables. La fragilité humaine n'est pas acceptable. La connaissance, le savoir sans le contrôle. Le vouloir, sans le pouvoir.
On a beau se répéter en boucle, "quand on veut, on peut". C'est vain. Tout est vain.

C'est l'origine de notre guerre contre nous mêmes. Nous nous détruisons, nous nous construisons. Nous créons des simulacres, nous en sortons. Mais avant tout nous cherchons Dieu. La cale manquante, le boson de Higgs, la dernière décimale de Pi. Nous cherchons ce qui expliquera l'inexplicable : comment l'éternité peut-elle être enfermée dans un corps périssable. Dans un temps limité et à sens unique. On nous dit coupable, car cela expliquerait tout, mais nous nous savons innocents. Nous nous savons bienveillants et altruistes. Nous jugeons à tort et à travers car nous imitons le modèle primordial qui nous juge à notre création.
Comme des enfants martyrisés, nous nous sentons coupables. C'est ce qui nous unit. Nous recherchons le pardon, le salut, ou le déni. C'est ce qui nous divise. C'est l'essence même de notre guerre fratricide. La logique et les fondements de notre monde physique veut que le déni l'emporte, grâce à l'aveuglement des foules qui cherchent le pardon. Quand à ceux qui s'orientent vers le salut, ils sont en minorité, et le font sans espoir. Car il n'est pas ici.

30.5.08

In God we trust (2/3)

Liberté, Rentabilité, Pouvoir

Notre société ne vit que pour l'argent. S'il est devenu une fin pour la plupart, nous avons vu qu'il est est resté un moyen pour d'autres. L'argent tel qu'il existe dans notre société, a la propriété de capturer les richesses et de les ramener à ceux qui les accumulent. On parle alors de rentabilisation. C'est l'objectif de tout ce qui se trame dans notre économie, dans notre monde : le rentabiliser. Pour que la monnaie remplisse sa mission inavouée, c'est à dire, l'acheminement des richesses, il est nécessaire de mettre en place quelques règles sur notre gigantesque terrain de jeu. Ou plutôt de les éradiquer. Il s'agit finalement d'inventer une règle qui justement, les éradique toutes. Il s'agit d'importer la confusion entre intérêts économiques et intérêts humains, en exploitant l'avidité latente de chacun issue du manque. Car effectivement, quel être humain ne rêverait pas de gagner plus d'argent ? Comme nous l'avons vu précédemment, nous en manquons avant même d'être nés et il nous est primordial d'en disposer pour survivre. Il est alors une évidence, pour les gens, que libérer l'économie est une chose positive, qui améliore le quotidien. Alors même qu'il le détruit.

Le libéralisme, appliqué à l'économie capitaliste, prend le nom de ce qu'il n'est pas, toujours tel un simulacre. Il réussit le fabuleux tour de passe passe de légaliser l'illégal, de moraliser l'immoral. De blanchir les tacherons. En Europe, et surtout en France, nous avons montré moultes hésitations, au cours du siècle dernier, à embrasser l'économie de marché libérale. Les gouvernements de gauche, ont été plus "permissifs" qu'ailleurs avec le peuple. Certains ont même osé prononcer des réticences vis à vis du marché, et sonner des alarmettes. On peut ainsi affirmer que nous étions un peu mieux lotis qu'ailleurs, en terme d'instruction, de soins, de libertés. Cela nous permettait même de penser à améliorer le monde.
Personnellement, j'ai aimé vivre de façon insouciante cette fin de vingtième siècle en France. On pouvait parfois avoir cette impression de ne pas être complètement pris pour des imbéciles. Et donc, on pouvait grandir, se former sereinement. Devenir des individus complets, responsables, et lucides. Il fallait donc à tout prix en finir.

Depuis quelques années les maîtres ont relâché leurs chiens sur nous. Leurs jolis banderoles, leurs panoplies colorées. Voici venu le temps de la liberté. Mais attention, pas celle des hommes. Celle des entreprises et de leurs actionnaires. C'est oublier que celles-ci adoptent les fonctionnements et comportements de psychopathes, à savoir l'utilisation et la négation d'individus comme moyens d'accomplissements. Une entreprise, pour atteindre la rentabilité, pratique sans vergogne le mensonge, l'offensive, la négation des autres, en visant particulièrement les plus réceptifs, c'est à dire, les plus faibles. Ils sont ses ressources, et donc aussi son but. L'affaiblissement et l'avilissement des gens la nourrit. Elle n'hésite pas à trahir ses collaborateurs et mettre sa moralité au placard. L'environnement, les ressources, les individus, ne constituent que des moyens. Des marchandises ou des agents intermédiaires. C'est bien simple, une entreprise ne cherche que le gain immédiat, et ignore les conséquences de ses actes, tant qu'elles ne nuisent pas aux gains immédiats. Toute forme de prévention et surtout de moralité, lui sont inconnues. Pire, elle lui sont interdites. Attention, ça ne veut pas dire que les membres d'une entreprises sont des psychopathes. C'est le caractère global de l'entreprise, celui de leur actionnariat, qui est dangereux, et le rapport qu'elle exerce aux personnes. Or les libertés désormais accordées ne freinent ou ne régulent en aucun cas cette dangerosité, mais l'exacerbe.
Appliqué aux hommes, cela revient à libérer et armer tous les esprits les plus pervers et dangereux, et les laisser faire. C'est ça, cette nouvelle liberté. La libération et le perfectionnement de tous nos prédateurs existants, ainsi que la matérialisation de tous nos prédateurs potentiels.

Désormais c'est admis, officiel, les syndicats et les mammouths n'y pourront plus rien. On peut mentir, cacher, polluer, brimer, stresser, casser, virer. On s'en fout. Il n'y a plus de règle. Aujourd'hui les plus grosses entreprises ne se gênent plus. Les gains astronomiques qu'elles engrangent décuplent les dividendes des actionnaires et rentiers. Les salaires des smicards, eux, ne montent pas. Puisqu'on vous dit que la conjoncture n'est pas la, croyez-le. C'est la faute aux salopards de gauchistes. Tous les méfaits de l'économie de marché libérale sont ignorés, ou attribués aux prédécesseurs, complètement ringardisés par le mouvement. Ce qui rend toute tentative de résistance futile. L'opposition officielle est quant à elle complice. Pour apporter le changement, et invoquer les réformes, il s'agit d'exhorter le peuple à accepter d'aller plus loin dans la logique.
Les pyromanes ont alors micro ouverts sur le monde pour nous exhorter à éteindre à l'essence les incendies qu'ils ont vomis. Et nous obéissons bien sagement. Sous couvert de valorisation du travail, ce sont en réalité les rentiers qui récoltent les fruits du travail des autres. On récompense le risque et la spéculation. On ignore ce qui ne constitue pas une rentabilité immédiate. Le paradoxe, c'est que le marché du travail sert le but que ses organisateurs nourrissent, à savoir se libérer du travail. Ceux ci prônent la valeur travail, mais ne cherchent en réalité qu'à enfermer le peuple dedans, pour qu'eux, puissent s'en libérer. La rentabilité, c'est aussi ça, en faire le moins possible tout en gagnant le plus possible. Le travail rend libre, puisqu'on vous le dit. Mais pas vous.

Les gains récompensent quasi exclusivement les rentiers, ou sont investis dans la pub. Mais surtout pas dans les rémunérations des salariés, qui ne doivent jamais toucher la carotte. Ils pourraient s'arrêter, ces ânes. Cette carotte ne doit être accessible que par rêve, par tirage au sort, par élimination des plus nombreux, ou évidemment, par relation. Hériter ou montrer patte blanche.
Les marques, notamment celles qui ont quasiment maté la concurrence, nous harcèlent de publicités. Des pubs à gros budgets, en boucle, différentes chaque semaine et en prime-time. Du fric qui aurait pu servir à rémunérer justement le travail des gens, dilapidé dans la propagande. Du matraquage qui coûte et qui rapporte des millions, que les chaînes privées rêvent de multiplier. La publicité devient l'outil majeur de communication, mais surtout de harcèlement. Nos cerveaux endormis y sont réceptifs. Ils sont réceptifs à la répétition, y compris d'un mensonge. Les publicités sont savamment placées au milieu de vos sitcoms favoris, demain peut-être vous sangleront-ils ?

Une des exigences du libéralisme est la libre concurrence. Sous couvert d'équité, cette "règle" fait en sorte que les groupes les plus forts engloutissent systématiquement les plus faibles. Cela revient à écouter les revendications des lions, qui réclament l'abolition des clôtures des brebis, sous couvert d'égalité et de justice. Vous avez dit loi de la jungle ? Effectivement, ce qui fait de nous des humains, ce désir de justice et d'équité, est mis au placard. Mais, nous ne nous contentons pas d'imiter les animaux, nous faisons bien pire. Les lions ont un estomac qui les limite. Pas les entreprises. Leurs estomacs sont sans fond et leur appétit sans fin. Ils sont une amibe qui engloutit les hommes et leur environnement. La nature a fait en sorte de réguler les lions. Nous les avons rendu invincibles, intouchables, immortels, et toujours plus voraces.
La libre "concurrence" produit des cartels de marques, qui au lieu de se concurrencer, vont, au mépris total du consommateur, se mettre d'accord sur les prix. Alléchant au début, il finissent toujours à la hausse. Quand aux monopoles, les soit disant ennemis jurés du libéralisme, ont-ils disparu ? En sommes nous enfin "libérés" ? Non, en réalité, c'est encore pire que ce qu'on pouvait attendre. Ils ont cédé la place aux neo-monopoles. Les groupes s'engloutissent, fusionnent et se monopolisent. Les marques appartiennent aux mêmes groupes, aux mêmes familles. Rappelez vous, l'argent a la propriété de rentabiliser : il détourne les richesses et les concentrent. Sans loi, sans règle, un marché ne peut produire que des monopoles. Les quelques plus riches rentiers du pays en deviendront propriétaire. C'est inexorable.
Que reprochait on aux anciens monopoles ? D'être indéboulonables, et de pouvoir, justement, résister aux rentiers. Mais avant tout, ce que nous appelons le service public, a la propriété de pouvoir résister à l'argent, dans le sens où, il n'est pas régi par la rentabilité immédiate, mais par la qualité. Un service n'est rendu que s'il a besoin d'être rendu. Il anticipe et admet la possibilité de ne pas être rendu. Il est fait pour durer, et s'adapter aux hommes. Il n'est pas rentable, il ne permet pas de transférer sa propre richesse. Il la partage au peuple. C'est en cela que les services publics étaient une richesse inestimable pour nous. Nous avons pourtant été conditionnés à les mépriser, en stigmatisant leurs défauts, que nous aurions pu facilement perfectionner. Les monopoles d'utilité publique sont devenus des monopoles de nuisances. Le traquenard a atteint son paroxysme alors que L'Europe du libéralisme a transféré la création monétaire de notre pays à des banques privées. Cela veut dire que l'Etat paye maintenant des intérêts pour l'argent qu'il émet, et donc creuse une dette sans fin, celle qui est cyniquement attribuée à nos derniers services publics. Cela veut aussi dire que l'Etat ne nous appartient plus, car sa banqueroute prochaine est une certitude. Il n'est plus en mesure de payer sa dette, mais est condamné à l'accroître, l'argent qu'il crée l'aggravant toujours plus. Nos hommes politiques le savent, mais ne peuvent se permettre de le dire. On ne peut pas critiquer ouvertement la main qui vous nourrit.
A la manière des publicités, ils se permettent désormais de mentir ouvertement. Le libéralisme a aussi libéré la langue de bois. Elle est devenue systématique, usuelle. Il s'agit uniquement de répéter plusieurs fois, sans prêter gare aux arguments opposés, des slogans, ou des propos démagogues. Ce qui est répété, finit par être assimilé comme une vérité.

Le plus grand paradoxe de la société libérale révèle son caractère vicieux : elle libère les entreprises, mais brime les individus. Elle mise sur la moralité des entreprises, et les juge irreponsables de leurs méfaits, tandis que les individus sont rendus responsables, coupables, et dénués de moralité. Toujours plus de libertés, de dérégulations pour le business. Mais toujours plus de lois, d'interdits pour les individus. On masque les fumées ici et la tout en continuant de déverser des flots d'essences sur l'incendie. On nettoie sans se soucier du carnage qui se déroule en profondeur. On maquille pour oublier l'abcès qui s'infecte. Le libéralisme veut libérer les entreprises, mais façonner les individus, les réglementer. Ainsi le caractère du citoyen est établi et tend à devenir uniforme. Il est façonné pour coller au modèle de société libérale. Celle ci réclame des consommateurs réguliers, dociles, et naïfs. Ce qui veut dire que l'addiction aux biens de consommation doit être encouragée, ainsi que la soumission à l'autorité, et surtout l'affaiblissement du niveau d'instruction. Ce sont les trois composantes indispensables du caractère de l'homo economicus, nouvel échelon de l'espèce humaine, façonné par l'homme lui même, et que nous appelons consommateur. Il y a ceux qui s'adaptent, et qui collent au modèle de société. Des individus qui rêvent de gagner plus et donc de stimuler l'économie, qui consomment, qui suivent les règles et respectent l'autorité. Ils sont régis par l'accumulation des biens matériels, et non par l'équilibre intérieur, comme accomplissement de soi. Des individus convaincus que quand on a, on est. Et plus on a, meilleur on est. Ils suivent la vie comme une quête sans fin des biens et services qui les définissent en tant que personnes, sans pourtant jamais y trouver leur compte. Ils sont aussi des individus qui ne posent pas de questions gênantes et ne cherchent pas à comprendre ce qu'il ne faut pas chercher à comprendre. Ils sont de parfaits soldats.
A contrario, les ennemis de ce modèle de société sont l'instruction, l'investigation, et la caricature. L'instruction permet la reconnaissance de ces maux, l'investigation permet d'en apporter la preuve, et la caricature permet de la communiquer. La dérision est destructrice en le sens qu'elle dévalorise et perce à jour l'absurdité totale du système, en une forme d'expression compréhensible par tous, y compris les moins réceptifs. La seule instruction reconnue devient celle des grandes écoles de commerce dont les droits d'entrée sont inaccessibles, le diplôme offert, et la matière principale la beuverie. Ces écoles ouvrent toutes les portes, et anihilent toute spécialisation et compétences, reléguées dans des facultés désoeuvrées sous couvert de réforme de l'université.

Le façonnage de l'individu modèle et les résistances qu'ils suscitent, implique que la répression prenne le dessus sur l'éducation et la prévention. Après avoir ôté toute morale aux échanges, il s'agit maintenant pour le système de moraliser en force les individus, y compris ceux qui le subissent le plus gravement, et donc montrent des signes de rejet. Les gens imitent ce qui les entoure et le système dans lequel ils vivent. L'individualisme, la concurrence et la défiance priment. La morale, la solidarité, tout ça ne veut plus rien dire. Les enfants imitent leur parents. Si ceux ci sont des ordures sans nom, il ne faut pas s'attendre à ce que les mômes deviennent des anges. On ne peut pas leur demander de déceler la subtilité des mensonges publicitaires, de sourire à la vue d'un sdf ou de bien prendre les arnaques de tous les jours qui ruinent toujours plus de gens. A comportements psychopathes, comportements psychopathes. De même que l'on ne peut pas non plus demander à ceux qui subissent le plus d'encaisser sans rien dire.
L'actuel président a souvent fustigé l'esprit de Mai 68. Cette période lors de laquelle les libertés individuelles ont pu s'exacerber, la caricature se déchaîner. Cette période ou l'expression de ce que nous sommes a pris le dessus. Et ça, c'est inconcevable. Nous ne devons pas être nous mêmes, nous devons être l'individu uniforme. Nous devons être l'expression du groupe, du projet global. D'où la nécessité de rééducation. Il faut que l'on soit abrutis et brimés pour accepter la soupe que l'on nous sert. Il faut nous apprendre à respecter l'autorité et l'Etat comme un réflexe.
L'actuel gouvernement veut réformer. Il utilise ce mot sans cesse, réforme, réforme, réforme, et à force de répétitions, nous l'avons intégré comme étant un besoin nécessaire et positif. Nous ne ressentons même plus le besoin de savoir ce qu'il faut réformer, nous savons juste qu'il est essentiel de le faire. Les ministres ne sont plus experts dans leurs domaines respectifs, mais sont devenus maîtres en communication. Ils sont constamment mis sous pression pour obtenir les résultats escomptés, à savoir l'asservissement consenti du peuple. Il ne peut être consenti que grâce à l'appui persuasif des médias, et à l'abrutissement organisé des gens, en utilisant la démagogie qui désignent les faux coupables détournant l'attention lors de faits divers sordides.
Au gouvernement comme dans toutes les hiérarchies, les compétences ont cédé la place aux petits chefs, aux débarqués issus des mêmes écoles. Les gens intègres et compétents se montrent inefficaces à appliquer des ordres absurdes. Les parachutés sautent sur l'aubaine et appliquent les ordres de leurs producteurs. Ils sont les relais de la pression qu'on leur insuffle, avec les effets dévastateurs que l'on connaît. Sur le stress, sur le travail, sur la vie.
L'étau qui se resserre autour de nous tend à réduire notre faculté à devenir des individus libres d'expression. Il s'agit d'une négation organisée de nos individualités, de ce qui fait de nous des êtres humains. Elle est rendue possible par la fusion de lobbies et de groupes d'influence, la collusion des médias, de la justice, des moyens de productions, et de l'autorité. La concentration des pouvoirs, comme au bon vieux temps, mais en mille fois pire.

Nous avons pourtant une boule de cristal à disposition pour nous prémunir, de l'autre côté de l'atlantique. Les Etats-Unis en sont à la fin du processus, complètement asséchés. Les pauvres sont plus pauvres qu'ailleurs. Ils meurent dans l'indifférence, n'ont pas le droit de se soigner. Le niveau d'instruction chute, les jeunes sont de plus en plus nombreux à être obèses. Les riches font n'importe quoi et polluent sans limite, accrocs au pétrole. Les lobbies ont main mise sur le pouvoir. Ils produisent même les films et choisissent les tendances d'Hollywood. Durant les 80' la tendance était aux méchants russes, notre siècle a vu débarquer en force les méchants français, ces salopards qui osent travailler 35 heures et voter à gauche. Le président Bush élu par trucage n'est qu'un pantin aux ordres d'industriels, militaires, et surtout banquiers, qui décident du destin d'autres pays. Qu'on l'annexe ou qu'on déboulonne son président, tous les moyens sont bons. Nos amis des médias finiront d'apporter les raisons d'une guerre et l'appui du peuple, à l'aide des sacro saint sondage, qui remplaceront bientôt définitivement nos cervelles. A quoi bon choisir ? C'est déjà fait !
Les ennemis de la nation sont torturés, et avouent l'inavouable la tête sous l'eau, au mépris de toutes les conventions du monde libre. La peur est devenu le moteur de cette nation. Elle détermine l'humeur du moment. Que ce soit d'un terroriste fantôme, ou de mômes au coin de sa rue, les gens ont peur, s'enferment et se soumettent à une armée de néo cons, sans doute les plus mauvais dirigeants de toute l'histoire. Ils votent lois, budgets, guerres, se partagent le pays alors qu'ils le démantèlent. Pendant ce temps les citoyens sont gavés comme des oies et rendus incultes. Les plus pauvres d'entre eux sont abandonnés noyés par la première catastrophe naturelle qui se présente, tandis que les autres sont envoyés au front, sous couvert de patriotisme salutaire.
En France, la Côte d'Azur autrefois si belle devient le bunker pour retraités qu'est la Floride. Bientôt les riches seniors engageront des milice privées pour se protéger des racailles et des musulmans. Les gens ne partagent plus rien, ils restent en groupe. La santé deviendra le privilège des fortunés. Les hôpitaux refouleront les sdf. Les gens paieront leurs appendicectomies en 12 fois, grâce à Sofincon (TEG 74,9%). Les ghettos de pauvres pourriront tandis que leurs habitants seront laissés à l'abandon. Quand ils broncheront un peu trop fort, on ira les tazer pour qu'ils se calment. Et si ça suffit pas, on les écrasera sous nos pare-chocs.

Notre président y met une telle conviction lorsqu'il prend son air scandalisé devant les "voyous" des banlieues ou les étudiants en colère. Il les responsabilise de ce qu'il leur fait subir, comme si une cause pouvait ne pas avoir d'effet, et une action rester sans réaction. Il veut faire oublier ce qui les a amené à ça. Il stigmatisera les films violents, les jeux vidéos, la musique, mais jamais, jamais il ne stigmatisera le système qui nous rend fou. La société qui fait de la négation de l'autre son mode de fonctionnement. Ce sont des mômes. Des ados. Des gens. Ça peut être vous ou moi. L'histoire veut habituellement que l'abruti regarde le doigt, or c'est justement ce que nous devrions faire. Les responsables sont ceux qui se défaussent, et montrent du doigt les autres. Ils déresponsabilisent les entreprises de leurs instincts voraces, et nous responsabilisent de nos réactions humaines. Ce n'est plus la vie. Ce n'est même pas la mort. C'est de l'anti-vie.

C'est le produit de l'argent et du libéralisme économique. L'anti-vie. Elle est exprimée par la rentabilité. La rentabilité comme but avilit tout. La rentabilité est la réaction de l'argent sur les richesses. Elles sont capturées, et accumulées en un point. Ce qui laisse un paysage dénué de richesses. La rentabilité raffine, extrait, siphonne, aspire. Elle nie toute forme de dualité ou de relation. Elle nie toute symbiose. Elle nie tout amour partagé. Elle nie toute vie. La rentabilité ne veut vivre que le jour, que l'été. La rentabilité sélectionne le meilleur, et méprise le reste. Elle nie l'éléphant mais exige les défenses. Elle nie le sommeil, elle ni le repos. Elle calcule en binaire, sans utiliser de zéro. On ne peut pas concevoir notre monde sans les contreparties. On ne peut pas faire avance rapide sur l'hiver. On ne peut pas nier la mort.
La rentabilité nie aussi les autres, et l'avenir. Seul le présent immédiat compte, appliqué à soi même. La rentabilité a une telle peur de la fin qu'elle veut vivre tout tout de suite. Elle tente vainement d'imiter l'infini et l'éternel. La rentabilité est une brèche qui aspire la vie toute entière dans une peur sans fin, elle est un trou noir qui aspire tout ce qui n'effraie pas ceux qui la cultivent. Elle exprime la peur qu'ils ont de la vie, et de la mort. La peur de la fin. La peur de la soumission, et des contraintes. La peur de la souffrance. Le désir d'être éternel, la volonté d'être dieu. Et le désarroi de ne pas l'être.
Le libéralisme sert la rentabilité, la rentabilité sert le pouvoir. La fin du hasard. L'illusion du pouvoir, et l'accaparation de tout. C'est un peu ressembler à Dieu, c'est échapper à sa malédiction.

J'ai bien peur que ce système qui s'adapte aux sociétés, en adopte le même fonctionnement. Au départ, les entreprises familiales pensent au bien être collectif, aux salariés. Puis lorsqu'une entreprise est vendue, on n'aperçoit que rarement le nouveau propriétaire ainsi que les actionnaires. Ceux-ci mettent en place une équipe, un Pdg, qui ont la propriété d'être malléables. Car ils prennent des décisions qui ne viennent pas d'eux. Ceux qui détiennent le capital, gardent le pouvoir, mais sont en coulisses, invisibles. La plupart des conseils d'administration s'entremêlent et deviennent inter entreprises. On siège entre potes, entre réseaux. Se constituer un réseau, il n'y a plus que ça qui compte. Les puissants avec les puissants. Et leur hobby, c'est ça. S'inviter aux conseils d'administration, se rémunérer pour des petits services, et ainsi démanteler toutes les boites qu'ils rachètent. Elles finissent toutes par être essorées de leurs richesses, et deviennent rentables.
On délocalise et surtout, on licencie. On se débarrasse de ce qui bouffe trop de ressources. Alors je commence à me dire que puisque ce sont les mêmes industriels et puissants financiers qui se regroupent et s'associent en lobbies, puisque ce sont au final quelques hommes qui sont devenus propriétaires des médias, gouvernements, banques et placards à bouffe; alors ces gens la finiront par rentabiliser leur grande entreprise mondiale. La plan social du Monde. Malheureusement, on ne peut pas encore délocaliser sur Mars, et c'est justement ce qui me fait peur.

L'économie libérale et ses entreprises ont pour ressource et pour but la faiblesse des gens. Sous couvert de création de richesses, elle crée des individus faibles, dépossédés de leurs richesses matérielles, personelles, spirituelles. L'affaiblissement généralisé des individus permet aux plus puissants de les consommer, les acheter, ou les utiliser. C'est en enfonçant les autres que l'on prend le dessus. Sans faibles, pas de pouvoir. Celui-ci est laissé à ceux qui détiennent le capital. Or ceux ci ne sont pas élus. Ils décident de tout, de tout ce qui constitue nos vies, mais nous ne choisissons pas ces personnes. Pis, ils nous sont invisibles, inconnus, et ne nous doutons pas qu'ils existent. Leurs dénonciateurs sont assimilés à des conspirationnistes farfelus, puisqu'ils désignent une évidence qui ne l'est pour personne. Pis, nous n'avons aucun moyen d'élire une opposition digne de ce nom, puisque les faibles ou gens proches du peuples n'ont pas les promoteurs ou les réseaux nécessaires à une propulsion sur le devant de la scène. On ne peut pas lutter dans les règles, car il n'y a plus de règles. Il n'y a plus que des complicités, des collusions, des pactes. Entre personnes de bonnes compagnies. C'est une alliance des plus forts, contre le peuple. C'est une guerre, pire que toutes les guerres, puisque un des deux camps n'y prend pas part. Il saborde l'autre derrière son masque invisible. Il met en guerre des pacifistes convaincus. Cachée sous les simulacres de l'économie, du commerce, de la politique, de l'information, de la religion, leur agression prend forme en nous.
Nous avilir pour aspirer ce qui fait de nous des humains. C'est un combat inégal qui rend les hommes moins hommes avant d'être nés. Il détourne notre désir d'amour et notre bienveillance innés, en une peur du manque et des autres. Il hypothèque le bien et alimente le mal. C'est un processus, qui, s'il est voulu, ôte tout sens à la vie. C'est un processus qui tend vers la mort, vers l'inexistence. Vers le néant. C'est un processus qui, si la vie a un sens, ne peut être qu'apocalyptique. Il constitue l'Antéchrist. Précédant la révélation qui nous délivrera.

29.5.08

In God we trust (1/3)

Tout n'est que simulacre. Nous en expérimentons une multitude. Ils s'entrechoquent. Ce que d'autres appelleraient un complot. Oui, n'ayons pas peur des mots. Si le premier des simulacres, qui part du Big Bang, nous échappe, les autres sont décelables. Une certaine remise en question, qui se doit d'être persistante et courageuse pour aboutir, permet d'ouvrir les yeux sur les dysfonctionnements du système. Telle Alice suivant son lapin blanc, ou comme n'importe qui s'empêtrant dans un rêve, nous pouvons tous accepter des enchaînements plus ou moins rationnels, même si à la base, il existe une irrationalité, une exception, un évènement que nous n'expliquons pas. Nous sommes constitués de telle manière que nous pouvons vivre avec une ou plusieurs exceptions, quand bien même elles seraient primordiales, et remettraient en question tout ce qui en découle.
Il nous arrive de percevoir nos rêves comme réels, parfois même quelques instants après s’être réveillés. Nous pouvons nous en souvenir et les revivre. En ressentir les émotions, en comprendre les réactions, bien que nos rêves recèlent des actes ou des scènes connectées par des aberrations. Cela veut tout simplement dire que notre esprit peut intégrer une aberration et reprendre le cours normal des évènements.

Ainsi nous vivons dans le meilleur des mondes. La démocratie. La définition du simulacre est "ce qui n'a que l'apparence de ce qu'il prétend être". Démocratie, le pouvoir au peuple. Avons-nous le pouvoir ? Sentez vous ce pouvoir lorsqu'au second tour de certains votes vous être pris en étau entre pire ou pire ? Que ce soit au premier tour, ou durant n’importe quelle élection, sentez vous ce libre choix ? C'est toujours mieux que la monarchie imposée. Mais si peu. Pourquoi ? Parce que l'imposition a le mérite d'être claire, visible, et donc de pouvoir être combattue. Le simulacre, lui, se terre au delà de nos perceptions. Son absence est sa cachette, et son poste de pilotage.
La république telle que nous la concevons fut un progrès temporaire qui a cédé sa place au simulacre. Désormais, et c’est entendu, ne peut être candidat à la présidence qu'un homme issu du même groupe de privilégiés, choisi par les plus influents d'entre eux. Cela revient à dire que la cour et son roi existent toujours, mais ne sont plus au devant de la scène. C'est d'ailleurs ce qui fait que le pouvoir du roi est beaucoup plus fort. Il semble être aux abonnés absents. A contrario, l'opposition semble présente, et siège à l'assemblée. Or les élus appartiennent quasiment tous au même groupe de privilégiés, de relations. Ils se forment entre eux, au sein d'écoles inaccessibles pour le commun des mortels. Ils se pistonnent, ou s'héritent. Les campagnes se financent, ou s'appuient. Autant de frontières entre le commun des mortels, et le pouvoir.

Ca ne nous perturbe pas plus que ça qu'une campagne ou une élection dépende des fonds qu'on y met. Que la décision, le "choix", dépende de la stratégie marketing mis en place, financé par lobbys influents et clients intéressés. Ceux la même qui se partagent les organes de presse. On part du principe que nous sommes égaux, mais les acteurs du pays sont élus sur un principe inégal. Les plus puissants ont la main, et la parole. Les médias publicitaires et rapporteurs d'informations, peuvent facilement convaincre nos cervelles fatiguées par de dures journées de labeur. Éprouvées par notre manque de repos, notre manque de temps de réflexion et d'assimilation des évènements. Car nous allons à toute allure. Nous sommes harcelés d'informations. Accablés de questions. Martyrisés de soucis, tous les jours dans notre entourage et dans le monde en général. Les mécanismes de notre pensée sont en sous effectifs. Ils ne peuvent traiter autant d'information. Et sont contraints de sous-traiter, aux médias, aux hommes politiques, aux guides spirituels. Aux publicités. Elles nous font découvrir des produits, des objets, et même des opinions que nous n'avons pas le temps de penser à découvrir. C'est magique. On se dit que lorsque le flux se sera un peu calmé, nous pourrons retrouver l'intégrité de notre cervelle, et se passer de ce service de sous-traitance. En attendant nous nous découvrons bouddhistes, socialistes ou amateurs de tecktonik. Nous choisissons dans le catalogue ce que l'on nous propose, en suivant l'avis de l'expert "indépendant" et la bonne moralité du moment. Mais la réalité, c’est que nous n’avons aucune idée de ce qui se passe. Seule une poignée de personnes comprend les mécanismes de la société, et du monde. Plus personne ne sait définir ce qu’est la gauche, la droite, le communise, le fashisme. L’extrême majorité des gens ne sait pas faire la différence. On leur demande de voter, d’accomplir leur devoir civique, mais si peu d’entre eux fait un choix en connaissance de causes. On imite, on vote au feeling, on reprend des idées qu’on a entendu ici ou la sans avoir pu les vérifier ou les comprendre. Et on finit par se dire que de toute façon ça ne change rien. Combien de gens comprennent la politique, l’économie, la croissance ? Connaissez vous les principes de la création monétaire ? Personne n’a le temps ni l’énergie pour apprendre à connaitre et maitriser tous ces principes. Personne. Nous n’avons pas le temps de nous arrêter pour penser, nous devons gagner notre vie sans plus attendre. Et sous traiter notre réflexion. Mais pas notre vote, car nous somme en démocratie. Mais au final, cela revient au même. Qui peut se targuer de choisir librement alors qu’il ne sait plus réfléchir ?

Le problème, c’est que nous pensons que cette sous-traitance est un service rendu, une main généreusement tendue par des individus au delà de tout soupçon. Tel un auto stoppeur perdu au milieu de nulle part, nous prenons le seul automobiliste qui passe, aussi louche soit-il. Et au final, malgré notre instinct réticent à l'idée de nous livrer et nous mettre en danger, nous passons l'éponge, de manière tout à fait irrationnelle, comme dans un rêve. Car sinon, ça ne fonctionne pas. C'est ce passage en force, ce coup de bluff, qui marque le début de notre acceptation du simulacre. Ce "choix" de la seule voiture qui passe, cette sélection d'opinions dans un catalogue. A partir de là, la superproduction peut commencer, et ses promoteurs peuvent s'engouffrer dans la brèche. Mais pour obtenir toujours plus de leurs hôtes, ils vont continuer le même cheminement, continuer à nous emmener au pays des rêves.

Pour atteindre leurs objectifs ils ont inventé l'arme suprême. Ce qui est à la base de tous nos maux et qui a permis d'ouvrir la brèche. L'outil ultime du pouvoir. Tel l'anneau unique, il contrôle tous les autres simulacres. Il nous tente, nous corrompt, nous avilit. Il exacerbe notre confusion et scelle définitivement notre incapacité à réagir. L'argent. La monnaie. Une invention de dingue. Un moyen qui se cache derrière une fin. La fin, c'est le pouvoir. Le pouvoir manger, le pouvoir s'habiller, le pouvoir se protéger, le pouvoir se soigner, le pouvoir ne plus se sentir obligé, le pouvoir se sentir libre. Le pouvoir faire oublier notre condition si fragile. Le pouvoir mener une existence plus douce. Le moyen, c'est nous. Car l'argent, qu'est ce que c'est, si ce n'est des morceaux de nous ? Des morceaux de nos vies, des morceaux de nos actes. Des morceaux de notre temps. On dit que le temps c'est de l'argent. Mais avant tout, l'argent, c'est du temps. L'argent, c'est la vie des autres. La vie passée, présente, et future.


Il est extrêmement difficile de réfléchir à la nature de l'argent, et aux mécanismes de sa création. Car son "secret" est au-delà du simulacre. Caché au dehors du système. Il implique de se réveiller d'un long sommeil, avec les conséquences que cela implique : gueule de bois, nausées et courbatures. L'argent, c'est des bouts de nous. Le simulacre de l'argent, c'est sa valeur. L'argent, c'est de la richesse, pense t-on. Non, l'argent c'est du papier. Ou des chiffres sur un disque dur. L'argent ne correspond plus à un étalon or ni à un équivalent de matières précieuses. La monnaie est dite fiduciaire, sa valeur est donc basée sur la confiance qu’on lui accorde. Les gens ou mécanismes qui la créent font en sorte que nous voyons actuellement en l'argent la prunelle de nos yeux. Ils sont malheureusement aussi capables d’en réduire sa valeur. D'inonder le marché, ou de le tarir. D'élever des barrages, ou de les détruire. De provoquer des crises, faisant baisser la valeur des actions, et tout racheter par la suite. L’argent tel qu’il existe n’est plus un moyen d’échange usuel et utile : l'argent est le moyen d'accaparation de toutes les vraies richesses du monde.
A sa création, la monnaie s'est engouffrée dans la brèche de la défiance. La confiance de l'échange, du partage et du don, a cédé sa place à la peur du manque et à la conscience du risque. Peut-être en profitant de l'effroi causé par une catastrophe naturelle, et de la peur consécutive du manque. Comme si un serpent était venu s'immiscer au milieu d'une transaction pour susurrer à l'oreille de chacun : "peux tu avoir en confiance en ton partenaire ?". Ainsi on a donc vendu, monnayé la confiance. Des bons de garantie. C'est ça que représente l'argent. La garantie de ne pas se faire avoir lors d'une transaction. L'illusion de contrôle sur les évènements, d'emprise sur la situation. Alors même que son existence exprime le fait que vous vous fassiez avoir. La monnaie n'a pour valeur que celle qu'on lui accorde. La monnaie est par définition, basée sur un principe de confiance, or elle nous soumet au comble de faire confiance en ce qui matérialise justement son absence. Donner du crédit à une dette. C'est ce paradoxe qui marque le début d'une cascade de soucis pour l'humanité.

Comment se crée l'argent. Est il infini ? Délivré par un organisme indépendant ? Combien coûte t il à fabriquer ? On ne pense pas à ces questions. Elles semblent inaccessibles. Je connais des employés de banque qui ignorent complètement les mécanismes de la création monétaire. C'est un peu comme le big bang. On sait que ça fait boum mais on n'en sait pas plus. Et on peut tout de même devenir scientifique.
L'argent est créé par les banques, via les banques centrales. Les vannes des flux de monnaies s'ouvrent plus ou moins grâce à l'ajustement des taux d'intérêts des banques centrales : ces taux déterminent la rareté ou l'abondance de la monnaie.
On s'imagine qu'en empruntant une somme à une banque, celle-ci prend un risque en nous confiant une somme qui lui appartient, et réclame à raison des garanties et une compensation financière. Pourtant un prêt consenti par une banque provoque la création de l'argent correspondant, qui n'a nul besoin d'exister auparavant. Un simple chiffre est ajouté, créé, à partir rien, sur votre compte bancaire. Ce que nous appelons communément un prêt bancaire n’est donc pas un prêt comme on l’entend habituellement. C’est un emprunt au néant, dont les intérêts profitent à quelqu'un, et dont les risques sont assumés par le client, à travers les garanties exigées pour obtenir ce "prêt" : salaire, maison, biens. La banque s'octroie le rôle de créancier en réclamant des intérêts qui ne lui reviennent pas, puisque la somme est créée de toute pièce.
L'argent créé est fictif, en dehors du circuit, mais les garanties, et surtout les intérêts, appartiennent bien au réel, ils proviennent du circuit des échanges économiques. Ils viennent de vous, de la société, de votre salaire, de votre vie de tous les jours. Une fois "remboursé", le prêt s'annule, les chiffres sont effacées et rendus au néant. Mais les intérêts, eux, ne disparaissent pas, ils restent dans la poche de la banque. Celle-ci a aspiré une richesse de son client en prélevant des intérêts sur une somme qui n'existait pas. Le client a rémunéré son banquier pour un service, et un risque qui n'existe que pour le premier.

La vérité, c'est que l'écrasante majorité de la monnaie en circulation n'existe pas. Elle sort du vide. On ne se prête pas l'argent. On l'emprunte au néant. C'est l'intérêt perçu sur ce faux emprunt qui est un traquenard, un vol, assimilable à du blanchiment d’argent. Une arnaque invisible pour le commun des mortels car la monnaie est un principe qui nous échappe complètement. Nous pensons fermement sous-traiter notre économie à des experts au delà de tout soupçon. Or la création monétaire n'est pas le fait d'organismes indépendants chargé de réguler l'économie et de redistribuer les intérêts perçus. Non il s'agit bel et bien de fonds privés qui disposent de ce pouvoir de création monétaire en faisant de notre économie un château de cartes.
L'argent pourrait fonctionner et remplir son rôle de facilitation des échanges. A condition qu'il s'équilibre, qu'il se crédite et s'annule à chaque transaction, qu'il corresponde à ce qui existe. Qu’il corresponde à des richesses réelles et non des dettes fictives. Ce qui fausse le mécanisme, c'est avant tout l'intérêt perçu sur la création monétaire, qui ne présente aucune contrepartie réelle, qui constitue un échange inéquitable, vicié. Ce circuit qui devrait être fermé, est ouvert. Il y a une fuite. Cela revient à prendre un bain dans une baignoire percée. Nous devrons toujours l'alimenter en eau. Mais il y a pire. A chaque création monétaire, à chaque intérêt perçu, le trou s'agrandit. La brèche s'aggrave à mesure que l'on ouvre les vannes. Nous devons toujours plus créer d'argent pour remplir le récipient.

Les échanges d'argent peuvent s'apparenter à des échanges de fluides. Tout coule. L'eau va à la rivière, et la rivière va à la mer. Les banquiers n'ont qu'à agiter la marmite percée, placer un tamis, et nous faire nager, toujours plus vite. Cette marmite c'est notre société, c'est nos échanges, nos achats, nos salaires, notre force de travail. Sous le tamis, ressortent les richesses qui perlent de nos corps, de nos idées, de nos actes, et des terres que nous exploitons. C'est la que réside la seule "création" de richesse qui existe. La création de richesse, c'est l'appauvrissement de nous mêmes et de notre environnement, c'est le transfert du meilleur de nous mêmes vers les personnes les plus fortunées. En nous inondant de bouts de papiers sans valeur, et en s'appropriant grâce à la vente de ceux-ci, les moyens d'alimentation, de production, de santé, de protection, nous sommes devenus des esclaves. Tenus de nous échanger ces bons, encore et toujours, pour nous acheter le droit de manger, de cultiver, de posséder. Nous naissons tous endettés, à vendre, pris dans le mouvement de la dette. Celle ci se creuse, à mesure que l'argent virevolte. Nous ne réalisons pas qu'il nous est impossible de rembourser une dette payante.
A chaque création d'argent, à chaque intérêt payé, c'est une partie de nos richesses qui se volatilise, qui file vers le néant en disparaissant hors de notre simulacre économique, le rendant bancal et dépendant d'une croissance exponentielle. Dépendant d'une autre dette. Puis d'une autre. C'est ça, le vrai cercle vicieux.
La création monétaire se représente par une équation qui ne s'équilibre pas, et qui se condamne à s'incrémenter à l'infini des deux côtés : Argent = Argent + intérêt. Cette aberration mathématique est à la base de notre économie, et pourtant elle passe inaperçue. Nous sommes tous trop préoccupés par la recherche de l'argent que la dette implique. Le seul moyen de devenir solvable est de prélever de la richesse ailleurs. De faire un autre "échange" inéquitable, mais en sa faveur. C'est un moyen de rétablir notre balance. Dans notre jargon, nous appelons ça, "faire une affaire". On se refile ainsi nos dettes. On naît tous avec la patate chaude dans les mains. Et nous nous la refilons, sous couvert de commerce et de marché économique. Le commerce tend à devenir la seule formation et la seule activité utile en ce monde, car c’est tout ce qui nous préoccupe, à mesure que notre partie de chaise musicale s’éternise.
Il y aura toujours des experts pour affirmer que ce mécanisme est juste, que les intérêts régulent l’inflation, et que les l’Etat ne peut créer de la monnaie car il ne se soucierait pas de l’inflation. Or accorder ce droit à des fonds privées ôte toute possibilité de régulation, car ils sont dénués de sentiment de service public ou d’intérêt général. Seul compte le profit immédiat, et pour preuve, la planche à billet n’a jamais tourné aussi vite. Comment stopper un appétit vorace alors qu’il a les clés du garde manger ? Pensez vous que le système actuel est juste ? Comment justifier que les rentiers & banquiers, qui créent des valeurs fictives, soient de plus en plus riches, alors que ceux travaillent et qui mettent en jeu de vrais richesses s’appauvrissent ? Comment justifier que les intérêts soient encaissés et non redistribués, ou rendus au néant pour lutter contre l’inflation ? La monnaie est la pour nous aider à faciliter les échanges mais regardons le monde en face : il y a des richesses partout, nous avons tous des bras, des jambes, des cervelles, nous savons tous créer de la richesse, de la vraie richesse, par nos actes et nos idées. Le moyen d’échange de ces richesses, cet étalon-temps-de-vie-humain, n’est pas construit équitablement. Il n’est pas un moyen d’échange, il est un moyen d’acheminement des richesses vers les plus riches. Il est vicié, instable. Il est construit d’une manière spéculative car il ne nécessite pas de contrepartie réelle équitable. Les banques sont tenus de disposer que de 10% de ce qu’elles prêtent. Sachant qu’elles se prêtent entre elles, on peut imaginer que tout le financement est construit sur du néant. Notre économie ne tient que par le mouvement. Un dollar qui passe entre dix mains à toute allure, et nous avons l’illusion de dix dollars. Mais lorsqu’on arrête la passe à dix, il ne reste qu’un dollar, et neuf personnes sur la paille. Que la confiance vienne à manquer, que les dettes cessent d’exister, et tout s’écroulerait. Le néant reprendrait sa place alors que la musique s’arrêterait. Ce fonctionnement a spéculé sur l’humanité et aujourd’hui nous en sommes la : nous sommes beaucoup trop, et la plupart de ceux qui sont en trop, sont beaucoup trop pauvres. En réalité, il ne peut y avoir de stabilité au sein d'une équation qui s'incrémente à l'infini, d'autant moins dans un monde fermé, dont la principale loi de survie est justement l'équilibre. L'argent, de part son mode de création absurde, n'existe que par l'instabilité qu'il introduit et l'accroissement nécessaire de la dette qui l'alimente. Il se nourrit de sa propre bouche. Et il a donc une fin.

La fin aurait pu survenir il y a longtemps. Or l'humanité s'est avérée recéler des richesses extraordinaires. Ce mécanisme a eu le mérite de pousser les hommes dans leurs derniers retranchements. Ils ont sué des richesses à en pleuvoir. La fuite de la dette s'est creusée, encore et encore, mais la baignoire s'est avérée incroyablement grande, et les hommes très bons nageurs. On a trouvé des sources de richesses partout. L'industrie, le pétrole, les nouvelles technologies, l'homme a travaillé dur, accroissant une dette béante désormais. Ce ne fut qu'un petit contretemps. Car la fin est inexorable. La dette introduite par l'argent est une serpillière qui s'imbibe et se noie à mesure qu'on l'essore.
Oui, il y a une fin. La création de richesse, exprimée par la croissance, a une fin. Nous sommes doté d'un savoir infini, mais nous sommes périssables. La Terre est ronde. Nos moyens de productions ne dépassent pas la fatigue, ni la mort. L'appauvrissement généré par la création monétaire commence seulement à se voir chez nous. Ce que nous appelons le Tiers monde existe depuis longtemps, mais était suffisamment loin pour qu'on ignore ce problème. Aujourd'hui, la fosse septique déborde jusque dans notre jardin. Les français s'insurgent du pouvoir d'achat, les premiers émeutiers de la faim se font entendre. Les matières premières sont piégées par la monnaie, qui les capture et les emmènent à ses maîtres, comme la pluie retourne à la rivière. L'argent liquide nous a filé entre les doigts. Nous sommes asséchés. Taris. Et nous allons tomber comme des mouches. L'usine à riches arrive au terme de son fonctionnement, lorsque les déchets la submergent. Elle a bien fonctionné, ils sont contents, mais maintenant ils peuvent couper l'eau et laisser la baignoire se vider, nous emportant dans le tourbillon. Ils vont se retirer et nous laisser dans la merde. Littéralement.
Minuit va sonner et le charme va se rompre. L'argent redeviendra papier, et les suites de zéro de simples chiffres. Le malheur dans tout ça, c’est qu’une crise ne nuit qu’à ceux qui n’ont rien demandé. Comme dans le Titanic, les troisième classe n’ont pas droit aux canots de sauvetages. Tandis que ceux qui nous ont conduit aveuglément à la catastrophe, savent en tirer les bénéfices. Lorsque le peu devient rien, l'énorme devient beaucoup. Lorsqu'on ne peut plus rembourser ses dettes, les garanties, les biens deviennent exigibles. Lors de la crise de 1929, quelques groupes puissants ont pu racheter des entreprises ruinées à des coûts dérisoires, et se goinfrer de ressources. En temps de crises, les vraies richesses naturelles reprennent leur statut. Or depuis des siècles, les banquiers internationaux accumulent les territoires, les matières premières, les matières précieuses, les groupes alimentaires. L'effondrement du système monétaire est inexorable et même nécessaire, dans ce processus de création d'hommes surpuissants. Car il mettrait à genoux le reste de la planète. Et c'est justement ce qui est recherché. D'un certain point de vue, l'affaissement des uns fait la grandeur des autres.

Il revient aux hommes de réaliser qu'ils sont des voleurs passifs. Des receleurs actifs. En achetant votre pain, vous participez à un vol. En vendant votre maison, vous participez à un vol. En payant votre médecin, vous participez à un vol. En faisant votre chiffre d'affaire du mois vous participez à un vol. En retirant du liquide, vous y participez aussi. Chaque mouvement économique est une secousse du tamis. Et à chaque secousse certains d'entre nous chutent. Chaque mouvement d'argent est un vol de nous même. Cette patate chaude, que nous nous refilons à notre naissance, cette dette, signe l'arrêt de mort de la plupart d'entre nous, et de notre environnement. En la faisant passer, nous sommes les complices du hold-up mondial. Nous sommes des milliards à jouer aux chaises musicales, sous les applaudissements de nos producteurs, qui jubilent, en retirant toujours plus de chaises, et en ajustant la musique à leur souhait. Notre acceptation des règles de ce jeu est un crime envers ceux qui y sont dramatiquement défaits.
Mais comment imaginer nous arrêter, puisque ces transferts de richesses nous constituent. Notre système ne vit que par la croissance économique et la réussite professionnelle. L'argent détermine nos conditions de vie. Il alimente notre garde manger. Il nous soigne. Mais plus encore. Chaque jour nous inventons des raisons de créer toujours plus d'argent. Les technologies et concepts que nous avons matérialisés s'achètent. En réalité, tout s'achète. Et l'argent, c'est la vie, pensons nous. Comment couper la vie telle que nous l'appréhendons ?

Chaque individu pense que gagner de l'argent rend libre, car nous naissons prisonniers. En réalité, il rend moins soumis un instant, et souvent de manière illusoire. Les publicités d'organismes de crédits ou d'assurances qui flirtent avec ce business, respirent la joie de vivre et la liberté. On nous dit que le travail rend libre, que la croissance est nécessaire, car ça nous fait gagner de l'argent, sans nous douter que nous travaillons à agrandir la prison, et entretenir les matons. Nous pouvons jurer que nous sommes propriétaires de nos richesses, et pourtant nous ne le sommes pas. Nous les empruntons aux banques, puisque celles-ci sont propriétaires de l’argent.
En cédant notre confiance à des bons de garantie, en introduisant l'argent dans le circuit des relations humaines, nous avons permis la création de quelques surhommes, et de milliards d'esclaves. C'est bien le but ultime de la monnaie. Plus on en a, plus on est. Le pouvoir qu'il nous confère nous rend maître de notre destin. Libre de manger, libre de boire, libre d'influer. Libre de jouir de tous les outils que nous avons inventé, et qui nous prolongent, qui nous complètent dans notre quête d'une supra humanité. L'argent nous rapproche de Dieu. Ainsi les hommes naissent inégaux. Nous naissons les poches vides, endettés, et soumis envers les créanciers du monde.

Certains d'entre nous peuvent naître près du tourbillon, et se faire emporter. Les mieux lotis peuvent naître assez loin, et ramer suffisamment pour échapper à la noyade. Nous ne pouvons pas être libres et égaux en droit tant que l'argent tel qu'il existe conditionne nos vies. Tant qu'il exprime une dette et non un moyen d'échange. Tant qu'il exprime une finalité vitale et non un moyen usuel. Tant qu'il nous incite à mentir, à arnaquer, à voler, à trahir. Cela va du mensonge "anodin" à son client, alors que les plus affamés iront jusqu'à vendre leurs organes à des salopards pour quelques euros salvateurs. Cela revient au même. Les mensonges dominent les vérités, telles les petites lignes sous nos slogans publicitaires, telles les fausses politesses que nous nous faisons à longueur de journée, tels les beep télévisuels lorsqu’une marque est prononcée dans une émission. Tout est faux et nous le savons, c’est le jeu. Nous savons que quelque chose cloche, mais nous ne saurions nous l’avouer en face.
Nous fonctionnons à l'envers. Nous voyons nos corps, nos âmes, comme des moyens et l'argent, comme une fin. Nous vendons nos fins contre le moyen de nous perdre. Nous vendons nos âmes. L'argent nous fait croire que nous pouvons tous vivre sur cette Terre. Il nous invite à une vie pleine de promesses. Mais en tant que dette, il fait de nous des sous hommes dépouillés. Nous sommes contraints, dès notre naissance, à regagner la valeur de notre être. Nous avons besoin d'argent pour nous nourrir, pour nous soigner, pour nous couvrir. Nous en avons besoin pour exister, et nous devons lutter pour le prendre à d'autres, car il n'y en a pas assez, il n'y en aura jamais assez, il s'enfuit au dehors, dans les mains de ceux qui l'ont dressé. Ne pas en avoir nous menace de mort et nous met sur le pied de guerre tout au long de notre vie. L'argent nous stresse et nous tue à l'idée d'en manquer. Il transforme le monde en guerre. Nous naissons compétiteurs, concurrents, conquérants. Chaire à canons ou seigneurs de guerre. Il nous avilit. Il nous lie. Il est la plaie de l'existence.

Peut-être ne vous sentez-vous pas soumis ? Vous sentez-vous libres ? Savez vous chasser ? Savez vous vous nourrir ? Savez vous vous passer du premier objet qui vous vient à l'esprit ? Savez vous vous panser vos plaies et celles de vos proches ? Êtes vous autonomes ?
Ne pensez vous pas que la vie devrait être gratuite ? Ne pensez vous pas que ce qui est gratuit est justement ce qui est inestimable ? Ce que nous tentons d'acheter, ce que nous tentons d'atteindre, nous ne le pourrons jamais. L'argent doit céder sa place à ce qui lui préexistait, la confiance. Car celle ci n'a pas de prix. La remplacer n'a fait que vicier tous les échanges et comportements humains. La remplacer a fait de nous des êtres qui ne sont plus des hommes. Même pas des animaux. Nous sommes avilis en des êtres indésirables, et destinés à disparaître, vendus au néant.

L'argent, c'est des bouts de nous, des bouts de nos vies, des bouts de nos temps. Il nous met en guerre et il nous tue. Il abrège notre temps. Pour des peureux, qui n'assument pas la fragilité de leur être et de la vie. Pour des rêveurs qui ont un complexe de Dieu. Nous ne pourrons jamais accumuler assez de vies d'hommes pour devenir Dieu. Ce qui est gratuit est inestimable. Ce qui n'a pas de prix ne s'achète pas. Il se donne. Se partage. S'échange. C'est ce que nous sommes, c'est ce que nous voulons.

11.2.08

Biohazard

Ca fait des mois que je bosse et que je suis sur les rotules. En rentrant le soir je n’ai le temps de rien. Je n’écris plus. Je ne pense que pendant mes deux heures de métro quotidien, quand j’arrive à émerger de ma nuit incomplète. Le problème, c’est que je ne peux pas pleurer dans le métro. Desfois j’en ai envie, et ça doit se voir sur mon visage. C’est souvent à ce moment la qu’un SDF passe en mendiant un euro, un ticket resto, ou même un sourire. Alors je tourne ma face vers la vitre, me cachant dans l’obscurité du tunnel.
Tout le monde fait ça. Ou alors on tente un sourire crispé qui ne fait qu’exprimer notre désarroi. On fuit son regard mais au final c'est le notre que nous voudrions perdre. Ca nous fait chier. Ca nous fait tellement chier au fond de nous. Cette incohérence.

On est tous comme ça, c’est le jeu. On sait tous que nos rolex, nos playstation, tout ça a un coût. Mêmes nos chiottes et cette eau du robinet dégueulasse, elle a un coût.
Enfin bon j’en suis plus la, tout ça c’est acquis. C’est juste que ma vie merde, ma vie bloque. Et puis... je me sens triste de pas être heureux. Je voudrais être heureux et j’y arrive pas. Je le suis de temps en temps, par à coups. Je voudrais être transporté de bonheur. Mais parfois j'ai l’impression de m’être consumé. Avec ma copine on a l'impression d'avoir consumés nos vies. Pschiiiit…

C'est comme si, tels des mômes trop curieux, on avait voulu ouvrir les yeux direct pour mater le père noël. Résultat, de cette fête magique, on a décelé une vaste supercherie abominable : des usines chinoises qui exploitent les mômes qui fabriquent nos cadeaux en plastique, polluant au passage des rivières et faisant disparaitre des centaines d’espèces; jusqu’à nos parents dépressifs et shootés aux anxiolytiques qui s’endettent pour payer ces joujoux qui nous feront quelques jours, à des pauvres employés surmenés et payés au smic.
Putain ça nous mine tout ça. On est complètement choqués. On peut pas être serein quand on sait tout ça. Pourquoi est ce qu’on a ouvert les yeux bon dieu ?! Non mais bon dieu de merde quelle idée ?! Personne ne nous a prévenus aussi, et je ne savais pas qu’il y avait un frein d’urgence à mettre pour toute tentative d’échappatoire intelligente et lucide. Le mieux est alors effectivement l’ennemi du bien. Notre condition doit rester floue. Opaque. Voire même complètement ignorée. C’est horrible de dire ça. Car pourtant desfois on sent qu’il y a du bien quelque part non ?

On sent que quelque chose de bien pilote tout ça. Enfin desfois je le sens. Et la plupart du temps ce sentiment reste un songe lointain et inaccessible. Car la réalité est implacable. La réalité, c’est mon poids, qui transfigure mes rêves d’envol. Nos envies d’éternité sont balayées par notre chaire. Notre sang. Rien qu’une allergie nous met à terre. Notre temps est compté. Telle est la réalité humaine. On est amené à disparaitre. Dans 5 secondes, 5 minutes, 5 années, on va tous disparaitre, les uns après les autres. Et ça, c’est une certitude. T’as beau inventer un vaccin, démontrer l’atome, t’as beau être un génie, un belâtre ou un clochard, tu vas crever. T’as beau être riche, même si tu penses que non, et ben si, tu vas crever. T’as beau te sentir invincible, comme ce trouduc qui s’assoit face aux flots avec son cigare et son verre de brandy, dans "Titanic"; aux derniers instants, tu vas avoir les foies. Et tu disparaitras dans tout cet océan de merde, poussière, et de boue. Et tu nourriras tous ces insectes gerbeux. On est tous de la merde. Des amas de merde qui se lèvent, font des trucs, achètent des actions, montent des entreprises, exploitent d’autres merdes. Et certains décident de ne pas se prendre pour de la merde. Et ceux la mettent les autres merdes encore plus dans la merde. Ils emmerdent encore plus cette vieille merde qu’est le monde. Car si il y a bien un moyen de faire en sorte que cette merde soit moins nauséabonde, c’est de prouver que nous ne sommes pas de la merde. Et qu’on peut être utile. Car je ne crois pas au hasard. Pas comme ça. Ce n’est pas possible. Même si l’on est rationnel. Même si la rationalité est notre devise, le scepticisme la clé de notre existence, on ne peut pas, croire au hasard qui a fait de ce monde, ce monde. Il y a nécessairement quelque chose. C’est, d’un point de vue logique et rationnel, beaucoup plus logique. La logique veut que tout ceci soit illogique. Il est beaucoup plus probable que tout ceci soit improbable.

Alors Dieu existe, c’est certain. Oui, je crois en Dieu. En fait j’y crois depuis longtemps, mais ça me faisait chier de le dire et de l’admettre. Car tous ceux qui croient en Dieu ici y croient d’une façon qui me déprime et me détourne de toute foi.
Je crois en Dieu, mais ça ne veut pas dire que je croie qu’il exprime quelque chose de forcément positif. Si ça se trouve c’est quelqu’un ou quelque chose de peu recommandable. Au vu de la merde dans laquelle on se trouve, c’est même hautement probable. Peut-être est il neutre, auquel cas il faut lui tenter de lui plaire.

L’autre jour, je pensais à un truc. Il y a beaucoup plus de malheur que de bonheur sur cette Terre. Je disais une fois qu’un de nos bras pèse infiniment plus lourd, et c’est ce qui fait que l’humanité s’écroule d’un coté. Y’a qu’à regarder les infos, ou parler, écouter autour de soi. Tous les gens que je connais sont au mieux « contents de temps à autres ». Je ne connais personne de véritablement heureux. Alors que je connais beaucoup de désespérés. Quant aux gens « heureux » que l’on nous montre à la télé, ils finissent tous par se droguer ou sombrer dans l’alcoolisme. La seule chose heureuse que j'ai vu, c'est mon chien, de son vivant. Oui ça lui il était heureux. Il kiffait bien la vie. 'Faut dire aussi qu’on a pas le même logiciel. Disons que pour nous, le bonheur simple est acquis. On appelle même plus ça du bonheur. Manger à sa faim, être au chaud, prendre une douche, avoir une femme, tout ça, c’est acquis. On attend plus. On ne saute pas de joie en buvant notre café le matin. Alors que mon clébard, lui, faisait une nouba de dingue en découvrant son plat, pourtant identique, et ce chaque jour de sa courte vie. Et croyez-moi c'était pas du caviar son truc.
Nous, si jamais on nous sert la même chose tous les jours, on fera une dépression ou une grève de la faim. Et au bout d'un moment, même avec du caviar... Mon chien bondissait de joie à chaque sortie alors que moi je m’enferme week-end end après week-end. Une caresse les font presque jouir, certaines personnes ici n’arrivent plus à bander.

On ne bande plus pour ce monde. L’Australopithèque devait kiffer, et il a kiffé encore plus quand il a trouvé une pierre, et le feu, à tel point qu’il est devenu de fil en aiguille Neandertal. Et puis il y a un moment, ça a merdé. On est devenu capitalistes. Je veux dire, comme dans toute boite qui n’arrive plus à faire des gros bénéfices, on s’attaque aux dépenses. On coupe ce qu’il faut couper. Alors on va couper. On va couper la chasse, le froid, la faim, la fatigue. Alors on cultive, on se protège, on construit, on conduit. L’action monte, toujours plus. L’indice CAC40 de l’humanité s’envole. Même si les bénéfices bloquent, les dépenses s’amenuisent. La condition humaine est rentable. Avez-vous déjà travaillé dans une boite rentable ? C’est d’un ennui mortel. Les avantages et réductions disparaissent, les gens ne se parlent plus, et le turn-over s’accélère.

On a réussi à atteindre des sommets par endroits. L’homme comprend beaucoup de choses, commence à maitriser la matière. Et arrive à éliminer les contraintes, rallonger sa vie. Il ne se dit pas que ces contraintes ont été levées par hypothèque. Et que tôt ou tard, il va y avoir un retour, un crash. On va tous se retrouver à poil, dans le froid et la faim.
Bref, c’est difficile d’être heureux dans un monde comme ça. Ce que je veux dire, c’est que ce n’est plus un monde adapté pour les personnes que nous sommes devenues. Le bonheur que l’on nous offre est acquis. Il fait partie de nos fondements. Nous ne pouvons pas réintégrer la faim, l’insécurité, la fatigue, la souffrance, et l’ignorance. Nos bases, ce qui fait que nous sommes conscients de nous-mêmes et du monde, sont dénués de ces sentiments. Ou ils en ont une connaissance légère. Nous ne pouvons pas réintégrer notre animalité. Car il nous est maintenant acquis que nous nous sommes séparés du règne animal. C’est ce cordon, qui nous relie encore, qu’il nous faut couper. Ce cordon élastique qui menace de nous emporter.

Nous vivons sous un plafond qui nous bloque l'accès à l'éternité, alors que nous grandissons inéxorablement. Nous allons mourir écrasés, ou devoir nous résoudre à vivre dans la cave, après une belle dégringolade qui laissera des traces...

On s’est emballé, on s’est habitué, on a progressé grâce à cela. Mais le monde ne progresse pas avec nous. Le monde reste un endroit potentiellement inhospitalier, vaste, et puissant. Nous restons des merdes. Des merdes qui se prennent pour autre chose... mais notre enveloppe reste merdique. C'est une bien mauvaise idée que de transporter du cristal dans du papier.
L’ennui, c’est qu'on ne réfléchit pas. On va commencer à réfléchir à tout ça quand on va se retrouver au bord du précipice. Et on se dira qu’on aurait peut-être du montrer notre valeur. Montrer qu’on mérite de passer au niveau du dessus. Un monde sans peur ni incertitude.

La vie est un pari. Croire en dieu est un pari. Ce que je souhaite dire, c’est que je n’ai pas demandé à jouer. On est là et on nous demande de jouer. Je voudrais desfois, juste, ne pas être. En même temps je me dis que ce serait triste, du gâchis pour rien. Que tout cela doit amener à quelque chose. Et puis je pense aux gosses qui meurent, aux caillaux de sang qui flinguent à tous va les hommes en pleine force de l’âge. Et la l’arbitraire reprend le dessus. La signification perd son sens et s’évanouit. Si ça se trouve je mourrai demain en faisant caca, ou dans 50 ans sur mon trône de roi du monde. Les deux solutions sont éventuelles, et ça, c’est difficilement intégrable. A la limite, cela pourrait être intéressant, si l’on avait une emprise totale ou du moins majeure. Si toute forme d’injustice était insignifiante.

1.11.07

Horreur Malheur

L’autre jour je me demandais si un endroit où la justice régnait serait bon à vivre. Je ne pense pas vous savez, et c’est ça qui me mine. Il faudrait alors que l’on cesse d’être parfait, que l’on range le fruit. A quoi bon sinon. On viserait tout le temps juste. On serait de véritables machines. Tous les matchs finiraient par des matchs nuls. Je sais pas. J’ai du mal à saisir. Il paraît qu’il faut du piment dans une pizza. D’autres soutiennent le contraire. Faut-il du piment dans la vie. Faut-il un coquin hasard. Parfois un hasard cruel. Devons nous savoir tout contrôler ?

J’aimerais ne plus avoir peur d’affronter les démons que je dénonce chez les autres. Etre assez courageux pour aller défier mon voisin bruyant, en sympathisant avec lui tout simplement. Etre assez courageux pour appeler mes anciens amis. Etre assez audacieux pour voyager sans craintes et sans attaches. Je me plains de la vie, du fait que les gens sont des peureux. Mais je suis comme eux. Je suis comme ce type, ce prof de gym incapable de faire une galipette. Ce donneur de leçon qui ne les a jamais apprises. Je me sens trop seul pour faire un pas en avant. J’ai besoin qu’on m’accompagne.

En fait tout le monde doit voir l’injustice, même sans y penser. Dans "Les Bienveillantes", il arrêterait bien de tuer les juifs, de faire des horreurs. Il a des accès, des réflexes d’humanité, au sein d’action inhumaines, horribles. Tout le monde joue la carte de l’horreur consciemment, mais en se disant qu’on est pris dans le mouve, incapables de remonter le courant. On fait ce qui doit être fait, mais si on était seul à décider, on agirait autrement. On ne sait plus prendre le pouvoir à son compte. On a trop peur pour son intégrité, on est habitué à avoir peur pour ça. Comme dans l'expérience de Milgram, nous nous refilons des electrochocs entre nous. Car on nous dit de le faire, et que l'on voit ses voisins faire la même chose. Car nos valeurs actuelles respectent aveuglément l'autorité et l'importance d'être dans la conformité. Pourtant, nous souffrons tous émotionellement de faire du mal. Nous souffrons car cela va à l'encontre de nos aspirations les plus profondes.

On est tous pareil. Nous sommes tous des bons-hommes qui agissent en salopards. On voudrait héberger le sdf du coin, on voudrait stopper la faim dans le monde, on voudrait être exemplaire. Mais on ne le fait pas. Car on se sent en minorité. C’est comme si chaque atome de plutonium d’une bombe atomique se sentait seul et impuissant, insignifiant. Qu’est ce qui fait qu’ils vont s’embraser ?

Je voudrais la connaître la justification des bienveillantes. La justification de cette boucherie ambiante et perpétuelle. De tous ces viols psychologiques. Ah c’est sur, si on prend de la distance avec la vie, avec la réalité, tout ça est bien peu. Et l’amour, ça aussi c’est bien peu ?!
Je veux vivre, être heureux, encourager l'amour. Mais parfois un murmure s'impose à mes oreilles :
A QUOI BON.

A Quoi bon souffrir, à quoi bon mourir, à quoi bon être tué, violé, villipendé, insulté, torturé, martyrisé. L’amour ? Etre aimé ? Etre chéri ? Un cadeau tel que l’amour est inestimable certes, mais qu’arrive-t-il lorsqu’on vous dit le prix ? Si j’offre la plus belle des bagues à mon amour, va t-elle l’apprécier encore plus lorsqu’elle saura qu’elle m’a couté tant ?! Elle sera soit déçue, soit déçue. Déception du peu, ou déception du trop. Il n’y a pas de juste valeur à tout ça. Il n’y a pas, il ne doit pas y avoir de contrepartie au bonheur. Pas autant. Je ne peux pas être heureux de me fourvoyer. Je ne peux pas être heureux de risquer la peine. Le risque ça peut être sympa, mais tout est relatif. Le viol ? La torture ? Et si vous me dites que ce n’est pas si terrible, que cela n’est que la vie, que tout ceci n’est qu’imperceptible en face de l’immensité de l’éternel, de l’infini, de la magnifique grandeur de dieu, alors merde, comment voulez vous qu’on prenne au serieux la vie.
Je t’aime mais, si tu te fais tuer, je serais pas triste, puisqu’on est tout petit, et qu’il y a plus important.

Tout est relatif dites vous ?! Alors je mène ma vie de manière relative. Je ne peux pas prendre mon pied. Je ne pourrai le prendre que relativement à des bonnes personnes, des bons moments, des bons feelings, en toute spontanéité. Je ne pourrai plus planifier, me projeter. Je ne pourrai plus faire de plans sur une comète dont la forme, la trajectoire, l’idée même de son existence, me rend tantôt perplexe, tantôt empli de dégoût.

A l’amour j’y oppose le désamour, la rupture, la séparation. Mais à la guerre, aux viols, aux massacres, aux actes les plus violents et immoraux possibles et qui s’existent de plus en plus ici au fur et à mesure que l’humanité perd la raison, à tous ceux la, je ne trouve pas de contrepoids, rien, rien, rien. Nous avons un bras qui pèse infiniment plus lourd que l’autre et nous chutons inexorablement. Il y a des bonnes choses, mais on tend à les oublier. Des actes de bonté isolés, des sourires rassurants. Mais ils se font rares, si rares. Et c’est comme si, comme si ils profitaient de l’horreur ambiante pour exister. Comme si sans celle ci, ils n’étaient rien.